4. LA VIE ET LES ENSEIGNEMENTS DE JÉSUS
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À GILBOA ET DANS LA DÉCAPOLE
LES mois de septembre et d'octobre de cet an 27 furent employés à une retraite dans un camp isolé sur les pentes du Mont Gilboa. Jésus y passa le mois de septembre seul avec ses apôtres, les enseignant et les instruisant dans les vérités du royaume.
Il y avait bien des raisons pour que Jésus et ses apôtres fissent à ce moment-là une retraite sur la frontière de la Samarie et de la Décapole. Les chefs religieux de Jérusalem étaient très hostiles. Hérode Antipas détenait toujours Jean en prison, craignant autant de le libérer que de l'exécuter, et il continuait à suspecter Jean et Jésus d'être quelque peu de connivence. Ces conditions rendaient contre-indiqué le projet d'une campagne active soit en Judée, soit en Galilée. Il y avait encore une troisième raison d'être prudent: la tension lentement croissante entre les chefs des disciples de Jean et les apôtres de Jésus, tension qui s'aggravait avec l'augmentation du nombre des croyants.
Jésus savait que les temps du travail préliminaire d'enseignement et de prédication étaient à peu près passés, et que ses prochains actes impliqueraient le commencement du plein effort final de sa vie terrestre; il ne voulait pas que le déclenchement de cette entreprise fût en aucune manière éprouvant ou embarrassant pour Jean le Baptiste. C'est pourquoi Jésus avait décidé de passer quelque temps dans une retraite à instruire ses apôtres, et ensuite de travailler paisiblement dans les villes de la Décapole jusqu'à ce que Jean fût ou bien exécuté, ou bien libéré pour se joindre à eux dans un effort unifié.
1. - LE CAMPEMENT DE GILBOA
A mesure que le temps passait, les douze étaient de plus en plus dévoués à Jésus et s'engageaient plus à fond dans le travail du royaume. Leur dévotion était surtout une affaire de fidélité personnelle. Ils ne saisissaient pas son enseignement complexe; ils ne comprenaient pleinement ni la nature de Jésus, ni la signification de son effusion sur terre.
Jésus expliqua clairement à ses apôtres qu'ils faisaient une retraite pour trois raisons:
| 1. Pour confirmer qu'ils avaient foi dans l'évangile du royaume et le comprenaient. |
| 2. Pour permettre à l'opposition à leur oeuvre de se calmer, tant en Judée qu'en Galilée. |
| 3. Pour attendre la décision sur le sort de Jean le Baptiste. |
Durant leur séjour sur le Mont Gilboa, Jésus donna aux douze beaucoup de détails sur sa jeunesse et sur ses expériences sur le Mont Hermon. Il leur révéla également une partie de ce qui s'était passé dans les montagnes durant les quarante jours qui suivirent immédiatement son baptême, et il les adjura instamment de ne parler à personne de cet épisode avant qu'il ne soit retourné vers le Père.
Au cours de ces semaines de septembre, les apôtres se reposèrent, eurent des entretiens, racontèrent leurs expériences depuis le moment où Jésus les avait appelés au service, et s'engagèrent dans un sérieux effort pour coordonner ce que le Maître leur avait enseigné jusqu'alors. Dans une certaine mesure, ils avaient tous le sentiment que ce serait leur dernière occasion de prendre un repos prolongé. Ils comprirent clairement que leur prochain effort public, soit en Judée soit en Galilée, marquerait le commencement de la proclamation définitive du royaume à venir, mais ils n'avaient pas d'idées bien définies sur ce que serait ce royaume lors de sa venue. Jean et André pensaient que le royaume était déjà venu; Pierre et Jacques croyaient qu'il était encore à venir; Nathanael et Thomas confessaient franchement qu'ils étaient perplexes; Matthieu, Philippe, et Simon Zélotès étaient incertains et troublés; les deux jumeaux étaient béatement ignorants de la controverse; et Judas Iscariot était silencieux et très réservé.
Jésus passa une grande partie de ce temps seul dans la montagne près du camp. A l'occasion, il emmenait Pierre, Jacques, ou Jean, mais le plus souvent il s'éloignait pour prier ou se recueillir seul. Après le baptême de Jésus et ses quarante jours dans les montagnes de Pérée, il n'est guère exact de qualifier de prière ces périodes de communion avec son Père, et il n'est pas non plus logique de dire que Jésus était en adoration. Par contre, il est entièrement correct d'appeler ces périodes des moments de communion personnelle avec son Père.
Le thème central des discussions durant tout le mois de septembre fut la prière et l'adoration. Après avoir analysé l'adoration pendant quelques jours, Jésus finit par prononcer son mémorable discours sur la prière, en réponse à la requête de Thomas: « Maître, apprends-nous à prier ».
Jésus avait enseigné une prière à ses disciples, une prière pour le salut dans le royaume à venir. Bien qu'il n'eût jamais interdit à ses disciples d'employer la forme de prière de Jean, les apôtres perçurent très tôt que Jésus n'approuvait pas entièrement la pratique de prononcer des prières immuables et officielles. Néanmoins, les croyants demandaient constamment qu'on leur apprenne à prier. Les douze désiraient ardemment connaître la forme de supplique que Jésus approuverait. Ce fut principalement à cause de ce besoin d'une supplique simple pour le commun du peuple que Jésus consentit alors, en réponse à la requête de Thomas, à leur enseigner une forme suggestive de prière. Jésus donna cette leçon un après-midi de la troisième semaine de leur séjour sur le Mont Gilboa.
2. - LE DISCOURS SUR LA PRIÈRE
« Jean vous a en vérité appris une simple forme de prière: « O Père, purifie-nous du péché, montre-nous ta gloire, révèle ton amour, et laisse ton esprit sanctifier notre coeur à toujours. Amen! » Il a enseigné cette prière pour que vous ayez quelque chose à enseigner à la multitude. Il n'avait pas l'intention de vous voir utiliser cette supplique immuable et officielle comme expression de votre propre âme dans vos prières.
« La prière est entièrement une expression personnelle et spontanée du comportement de l'âme envers l'esprit; la prière devrait être la communion des fils et l'expression de la fraternité. Quand elle est dictée par l'esprit, la prière mène au progrès spirituel coopératif. La prière idéale est une forme de communion spirituelle qui conduit à l'adoration intelligente. La vraie prière est l'attitude sincère d'un élan vers le ciel pour atteindre nos idéaux.
« La prière est le souffle de l'âme et devrait vous inciter à persévérer dans vos tentatives pour mieux connaître la volonté du Père. Si l'un de vous a un voisin et va vers lui à minuit en disant: « Ami, prête-moi trois miches, car un de mes amis en voyage est venu me voir et je n'ai rien à lui offrir », et si votre voisin répond: « Ne me dérange pas, car la porte est maintenant fermée et je suis au lit avec les enfants; je ne peux donc te donner de pain », vous insisterez en expliquant que votre ami a faim et que vous n'avez pas de nourriture à lui offrir. Votre voisin ne se lèvera pas pour vous donner du pain par amitié pour vous, mais je vous dis qu'à cause de votre importunité il se lèvera et vous donnera autant de miches qu'il vous en faut. Si donc la persistance gagne les faveurs même des hommes mortels, combien plus votre persistance dans l'esprit obtiendra-t-elle pour vous le pain de vie des mains bienveillantes du Père qui est aux cieux. Je vous le dis à nouveau: Demandez, et l'on vous donnera, cherchez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit; celui qui cherche trouve; et la porte du salut est ouverte à celui qui frappe.
« Quel père d'entre vous, si son fils fait une demande inconsidérée, hésitera à lui donner selon la sagesse parentale (1) plutôt que selon les termes de la requête défectueuse du fils? Si l'enfant a besoin d'une miche, lui donnerez-vous une pierre simplement parce qu'il vous l'a étourdiment demandée? Si votre fils a besoin d'un poisson, lui donnerez-vous un serpent d'eau simplement parce que vous en avez attrapé un dans vos filets avec les poissons, et que l'enfant vous demande sottement le serpent? Si donc, étant mortels et finis, vous savez répondre aux prières et faire à vos enfants de bons cadeaux appropriés, combien plus votre Père céleste donnera-t-il l'esprit et nombre de bénédictions supplémentaires à ceux qui les lui demanderont? Les hommes devraient toujours prier et ne pas se décourager (2).
« Laissez-moi vous raconter l'histoire d'un certain juge qui vivait dans une ville perverse. Ce juge ne craignait pas Dieu et n'avait pas de respect pour les hommes. Or il y avait dans cette ville une veuve nécessiteuse qui allait constamment chez ce juge injuste en lui disant: « Protège-moi de mon adversaire ». Pendant quelque temps il ne voulut pas lui prêter attention, mais bientôt il se dit en lui-même: « Je ne crains pas Dieu et n'ai pas de considération pour les hommes, mais parce que cette veuve ne cesse de me déranger, je ferai droit à sa revendication de peur qu'elle ne m'épuise par ses visites continuelles » (3). Je vous raconte ces histoires pour vous encourager à persévérer dans la prière, et non pour vous laisser croire que vos suppliques modifieront la justice et la droiture du Père céleste. Votre persistance n'est pas destinée à gagner la faveur de Dieu, mais à changer votre comportement terrestre et à accroître l'aptitude de votre âme à recevoir l'esprit.
« Mais lorsque vous priez, votre foi est bien faible. Une foi authentique déplacera les montagnes de difficultés matérielles qui peuvent barrer le sentier de l'expansion de l'âme et du progrès spirituel.
| (1) Le mot anglais parental, signifiant aussi bien paternel que maternel, a été repris tel quel dans le texte français. | |
| (2) Cf. Luc XI-1 à 13. | |
| (3) Cf. Luc XVIII-1 à 8. |
3. - LA PRIÈRE DU CROYANT
Les apôtres n'étaient pas encore satisfaits; ils désiraient que Jésus leur donne une prière modèle qu'ils puissent enseigner aux nouveaux disciples. Après avoir écouté le discours sur la prière, Jacques Zébédée dit: « Très bien, Maître, mais c'est moins pour nous que nous désirons une forme de prière que pour les nouveaux croyants qui nous demandent si souvent: Apprenez-nous à adresser des prières acceptables au Père qui est aux cieux ».
Lorsque Jacques eut fini de parler, Jésus dit: « Si donc vous désirez encore une telle prière, je vous offrirai celle que j'ai apprise à mes frères et soeurs à Nazareth.
| Notre Père qui es aux cieux, |
| Que ton nom soit sanctifié. |
| Que ton règne vienne; que ta volonté soit faite |
| Sur terre comme elle l'est au ciel. |
| Donne-nous aujourd'hui notre pain pour demain |
| Rafraîchis nos âmes avec l'eau vivante |
| Et remets à chacun de nous ses dettes |
| Comme nous les avons aussi remises à nos débiteurs. |
| Sauve-nous dans la tentation, délivre-nous du mal, |
| Et rends-nous de plus en plus parfaits comme toi-même. |
Il n'est pas étonnant que les apôtres aient désiré que Jésus leur apprenne une prière modèle pour les croyants. Jean le Baptiste avait enseigna plusieurs prières à ses disciples; tous les grands instructeurs ont formulé des prières pour leurs élèves. Les éducateurs religieux des Juifs avaient vingt-cinq ou trente prières immuables qu'ils récitaient dans les synagogues et même aux coins des rues. Jésus était particulièrement opposé à la prière en public. Jusqu'alors, les disciples ne l'avaient entendu prier qu'en de rares occasions. Ils le voyaient passer des nuits entières en prière ou en adoration, et ils étaient très curieux de connaître la nature ou la forme de ses suppliques. Ils étaient poussés dans leurs derniers retranchements pour répondre aux multitudes demandant qu'on leur apprenne à prier comme Jean l'avait appris à ses disciples.
Jésus enseigna aux douze à toujours prier en secret, à partir seuls dans les tranquilles paysages de la nature ou à aller dans leur chambre et à fermer les portes quand ils entreprendraient de prier.
Après la mort de Jésus et son ascension auprès du Père, la pratique s'établit chez beaucoup de croyants de finir la soi-disant prière du Seigneur en y ajoutant: « Au nom du Seigneur Jésus-Christ ». Plus tard encore, deux lignes furent perdues dans les copies et l'on y ajouta la déclaration supplémentaire: « Car à toi appartiennent le royaume, le pouvoir, et la gloire, pour l'éternité ».
Jésus donna aux apôtres sous forme collective la prière telle que sa famille la formulait au foyer de Nazareth. Il n'enseigna jamais de prière personnelle officielle, mais seulement des suppliques collectives, familiales, ou sociales. Et il ne le fit jamais spontanément.
Jésus enseigna que la prière efficace doit être:
| 1. Désintéressée — pas seulement pour soi-même. | |
| 2. Croyante — conforme à la foi. | |
| 3. Sincère — honnête de coeur. | |
| 4. Intelligente — conforme à la lumière. | |
| 5. Confiante — en soumission à la volonté infiniment sage du Père. |
Quand Jésus passait des nuits entières sur la montagne à prier, c'était surtout pour ses disciples, et en particulier pour les douze. Le Maître priait très peu pour lui-même, mais il pratiquait beaucoup l'adoration, une adoration dont la nature était une communion compréhensive avec son Père du Paradis.
4. - COMPLÉMENTS SUR LA PRIÈRE
Pendant les jours qui suivirent le discours sur la prière, les apôtres continuèrent à poser au Maître des questions concernant cette pratique cultuelle d'une importance capitale. On peut résumer comme suit en langage moderne les instructions sur la prière et l'adoration que Jésus donna aux apôtres durant ces journées:
Quand vous répétez une supplique quelconque d'une manière fervente, quand cette prière est l'expression sincère d'un enfant de Dieu et qu'elle est formulée avec foi, si peu susceptible qu'elle soit de recevoir une réponse directe et si malavisée qu'elle puisse être, elle ne manque jamais d'accroître l'aptitude de l'âme à la réceptivité spirituelle.
Dans toutes vos prières, souvenez-vous toujours que la filiation est un don. Nul enfant ne doit s'occuper de gagner le statut de fils ou de fille; cela ne le regarde pas. L'enfant terrestre vient à l'existence par la volonté de ses parents. De même, l'enfant de Dieu parvient à la grâce et acquiert la nouvelle vie de l'esprit par la volonté du Père qui est aux cieux. Il faut donc que le royaume des cieux — la filiation divine — soit reçu comme par un petit enfant. On gagne la droiture — le développement progressif du caractère — mais on reçoit la filiation par grâce et au moyen de la foi.
La prière éleva Jésus à la super-communion de son âme avec les Chefs Suprêmes de l'univers des univers. La prière élèvera les humains à la communion du véritable culte. L'aptitude de l'âme à recevoir l'esprit détermine la quantité de bénédictions célestes que l'on peut s'approprier personnellement et comprendre consciemment comme une réponse à la prière.
La prière, et l'adoration qui lui est associée, sont une technique pour se détacher des besognes de la vie courante, des travaux monotones de l'existence matérielle. C'est une méthode pour s'épanouir spirituellement et acquérir l'individualité intellectuelle et religieuse.
La prière est un antidote contre l'introspection nuisible; au moins, la prière telle que le Maître l'a enseignée apporte ce bienfait à l'âme. Jésus employa avec persistance l'influence bénéfique de la prière pour autrui. Le Maître priait en général pour plusieurs personnes et non pour une seule. C'est seulement dans les grandes crises de sa vie qu'il pria pour lui-même.
La prière est le souffle de la vie de l'esprit au milieu de la civilisation matérielle des races de l'humanité. L'adoration constitue le salut pour les générations de mortels qui recherchent le plaisir.
De même que l'on peut assimiler la prière à la recharge des batteries spirituelles de l'âme, de même on peut comparer l'adoration à la synchronisation de l'âme pour capter les télécommunications universelles de l'esprit infini du Père Universel.
La prière est le regard sincère et plein de désir jeté par l'enfant sur son Père spirituel; c'est un processus psychologique consistant à troquer la volonté humaine contre la volonté divine. La prière fait partie du plan divin pour remodeler ce qui existe en ce qui devrait exister.
L'une des raisons pour lesquelles Pierre, Jacques, et Jean, qui accompagnaient si souvent le Maître dans ses longues veilles nocturnes, n'entendirent jamais Jésus prier vient de ce que leur Maître exprimait fort rarement ses prières en langage parlé. Pratiquement, toutes les prières de Jésus étaient faites dans son esprit et dans son coeur — en silence.
Parmi tous les apôtres, ce furent Pierre et Jean qui comprirent le mieux l'enseignement du Maître sur la prière et l'adoration.
5. - AUTRES FORMES DE PRIÈRE
Durant le reste de son séjour sur terre, Jésus attira de temps en temps l'attention des apôtres sur plusieurs autres formes de prière, mais il ne le fit que pour illustrer d'autres questions et enjoignit aux douze de ne pas enseigner aux foules ces « prières en paraboles ». Beaucoup d'entre elles venaient d'autres planètes, mais Jésus ne révéla pas ce fait aux douze. Parmi elles se trouvaient les suivantes:
| Notre Père en qui existent les royaumes de l'univers, | |
| Que ton nom soit exalté et ton caractère glorifié. | |
| Ta présence nous englobe et ta gloire est manifestée | |
| Imparfaitement à travers nous, comme elle se montre en perfection au ciel. | |
| Donne-nous aujourd'hui les forces vivifiantes de lumière, | |
| Et ne nous laisse pas errer | |
| Dans les mauvaises voies détournées de notre imagination. | |
| Car à toi appartiennent la glorieuse présence, le pouvoir éternel, | |
| Et à nous le don éternel de l'amour infini de ton Fils. | |
| Ainsi soit-il, en vérité perpétuelle. | |
| *** |
| Notre Parent créateur, qui es au centre de l'univers, | |
| Effuse sur nous ta nature et donne-nous ton caractère. | |
| Fais de nous par ta grâce tes fils et tes filles | |
| Et glorifie ton nom par notre entrée dans l'éternité. | |
| Laisse ton esprit d'adaptation et de contrôle vivre et habiter en nous | |
| Pour nous permettre de faire ta volonté sur cette sphère | |
| Comme les anges sont à tes ordres dans la lumière. | |
| Soutiens aujourd'hui nos progrès dans le sentier de la vérité. | |
| Délivre-nous de l'inertie, du mal, et de toute transgression impie. | |
| Sois patient avec nous, | |
| De même que nous témoignons une bonté aimante à notre prochain. | |
| Répands l'esprit de miséricorde dans notre coeur de créatures. | |
| Conduis-nous de ta propre main, pas à pas, dans le dédale incertain de la vie, | |
| Et quand viendra notre fin, reçois dans ton sein nos esprits fidèles. | |
| Ainsi soit-il, que ta volonté soit faite. et non nos désirs. | |
| *** |
| Notre Père céleste parfait et juste, | |
| Guide et dirige aujourd'hui notre voyage. | |
| Sanctifie nos pas et coordonne nos pensées. | |
| Conduis-nous toujours dans les voies du progrès éternel. | |
| Remplis-nous de sagesse jusqu'à la plénitude du pouvoir | |
| Et vivifie-nous de ton énergie infinie. | |
| Inspire-nous par la conscience divine | |
| De la présence et de la gouverne des armées séraphiques. | |
| Guide-nous toujours plus haut dans le sentier de lumière | |
| Justifie-nous pleinement au jour du grand jugement. | |
| Rends-nous semblables à toi en gloire éternelle | |
| Et reçois-nous à perpétuité dans ton service exalté. | |
| *** |
| Notre Père qui es dans le mystère, | |
| Révèle-nous ton saint caractère. | |
| Donne aujourd'hui à tes enfants terrestres | |
| De voir le chemin, la vérité, et la vie. | |
| Montre-nous le sentier du progrès éternel | |
| Et donne-nous la volonté d'y marcher. | |
| Établis en nous ta divine souveraineté | |
| Et effuse ainsi sur nous la pleine maîtrise de soi. | |
| Ne nous laisse pas errer dans des sentiers de ténèbres et de mort; | |
| Conduis-nous perpétuellement auprès des eaux vivantes. | |
| Par égard pour toi-même, écoute les prières que nous faisons; | |
| Sois heureux de nous rendre de plus en plus semblables à toi. | |
| À la fin, pour l'amour du divin Fils, | |
| Reçois-nous dans les bras éternels. | |
| Ainsi soit-il, que ta volonté soit faite et non la nôtre. | |
| *** |
| Glorieux Père et Mère, unifiés en un seul ascendant, | |
| Nous voudrions être fidèles à ta nature divine. | |
| Que ta propre personne revive en nous et à travers nous | |
| Par le don et l'effusion de ton esprit divin; | |
| Nous te copierons ainsi imparfaitement dans cette sphère | |
| Tel que tu te montres en perfection et en majesté au ciel. | |
| Donne-nous jour après jour notre doux ministère de fraternité | |
| Et conduis-nous d'instant en instant dans la voie de l'entraide d'amour. | |
| Sois toujours et infailliblement patient avec nous | |
| Comme nous témoignons ta patience à nos enfants. | |
| Donne-nous la divine sagesse qui accomplit bien toutes choses | |
| Et l'amour infini qui est bienveillant envers toute créature | |
| Effuse sur nous ta patience et ta bonté aimante | |
| Afin que notre charité enveloppe les faibles du royaume. | |
| Et quand notre carrière sera achevée, fais d'elle un honneur pour ton nom, | |
| Un plaisir pour ton esprit, et une satisfaction pour le soutien de notre âme. | |
| Que le bien éternel de tes enfants mortels ne soit pas celui que nous souhaitons, | |
| O notre Père aimant, mais celui que tu désires. | |
| Ainsi soit-il. | |
| *** |
| Notre Source toujours fidèle et notre Centre tout-puissant, | |
| Que le nom de ton Fils plein de grâce soit saint et révéré. | |
| Tes bontés et tes bénédictions sont retombées sur nous, | |
| Nous donnant le pouvoir d'accomplir ta volonté et d'exécuter tes commandements. | |
| Donne-nous d'instant en instant le soutien de l'arbre de vie; | |
| Rafraîchis-nous jour après jour avec les eaux vives de ce fleuve. | |
| Conduis-nous pas à pas hors des ténèbres et dans la lumière divine. | |
| Renouvelle nos pensées par les transformations de l'esprit intérieur, | |
| Et quand la fin mortelle finira par nous atteindre, | |
| Reçois-nous près de toi et envoie-nous dans l'éternité. | |
| Couronne-nous des diadèmes célestes du service fructueux, | |
| Et nous glorifierons le Père, le Fils, et la Sainte Influence. | |
| Ainsi soit-il, dans tout un univers sans fin. | |
| *** |
| Notre Père qui habites dans les lieux secrets de l'univers, | |
| Que ton nom soit honoré, ta miséricorde révérée, et ton jugement respecté. | |
| Que le soleil de la droiture brille sur nous au milieu du jour, | |
| Tandis que nous te supplions de guider nos pas indociles dans le clair-obscur. | |
| Conduis-nous par la main dans les voies que tu auras choisies. | |
| Et ne nous abandonne pas quand la route est dure et l'heure sombre. | |
| Ne nous oublie pas comme nous t'oublions et te négligeons si souvent. | |
| Sois miséricordieux et aime-nous comme nous souhaitons t'aimer. | |
| Regarde-nous d'en haut avec bonté et pardonne-nous avec miséricorde | |
| Comme nous pardonnons en justice à ceux qui nous chagrinent et nous blessent. | |
| Puissent l'amour, le dévouement, et l'effusion du Fils majestueux | |
| Nous procurer la vie éternelle avec ta miséricorde et ton amour sans fin. | |
| Puisse le Dieu des univers effuser sur nous la pleine mesure de son esprit; | |
| Donne-nous la grâce de nous plier aux directives de cet esprit. | |
| Puisse le Fils nous guider et nous mener jusqu'à la fin de l'âge | |
| Par le ministère aimant d'armées séraphiques dévouées. | |
| Rends-nous toujours de plus en plus semblables à toi-même, | |
| Et lors de notre fin, reçois-nous dans l'embrassement éternel du Paradis. | |
| Ainsi soit-il, au nom du Fils d'effusion | |
| Et pour l'honneur et la gloire du Père Suprême. | |
Bien que les apôtres ne fussent pas libres de présenter ces leçons sur la prière dans leurs enseignements publics, ils profitèrent beaucoup de toutes ces révélations dans leur expérience religieuse personnelle. Jésus utilisa ces modèles de prière et d'autres encore comme exemples liés à l'instruction intime des douze. La permission de reproduire ces sept spécimens de prière dans le présent exposé a été spécifiquement accordée.
6. - CONFÉRENCE AVEC LES APÔTRES DE JEAN
Vers le 1ier octobre, Philippe et plusieurs autres apôtres se trouvaient dans un village voisin, achetant des vivres, lorsqu'ils rencontrèrent quelques uns des apôtres de Jean le Baptiste. Cette rencontre fortuite sur la place du marché eut pour résultat une conférence de trois semaines au camp de Gilboa entre les apôtres de Jésus et les apôtres de Jean, car Jean, imitant le précédent de Jésus, avait récemment nommé apôtres douze de ses principaux disciples. Il l'avait fait en réponse à la demande pressante d'Abner, chef de ses loyaux partisans. Jésus resta présent au camp de Gilboa durant toute la première semaine de cette conférence commune, mais s'absenta durant les deux dernières semaines.
Vers le 8 octobre, Abner avait rassemblé tous ses disciples au camp de Gilboa et se trouvait prêt à conférer avec les apôtres de Jésus. Durant trois semaines, ces vingt-quatre hommes tinrent session trois fois par jour et six jours par semaine. La première semaine, Jésus se mêla à eux entre leurs sessions du matin, de l'après-midi, et du soir. Ils voulaient que le Maître se joigne à eux et préside leurs délibérations conjointes,,mais il refusa fermement de participer à leurs discussions. Ils consentit cependant à leur parler en trois occasions, et ces allocutions de Jésus aux vingt-quatre portèrent sur les sujets de la compassion, de la coopération, et de la tolérance.
André et Abner prirent alternativement la présidence de ces réunions communes des deux groupes apostoliques. Il y avait bien des difficultés à débattre et de nombreux problèmes à résoudre. Maintes et maintes fois ils voulurent soumettre leurs ennuis à Jésus, sans autre résultat que de l'entendre dire: « Je ne m'occupe que de vos problèmes personnels et purement religieux. Je suis le représentant du Père auprès des individus et non auprès des groupes. Si vous êtes personnellement en difficulté dans vos relations avec Dieu, venez à moi; je vous écouterai et vous conseillerai dans la solution de votre problème. Mais si vous entreprenez de coordonner des interprétations humaines divergentes relatives à des questions religieuses et d'établir une religion sociale, il vous faut résoudre tous ces problèmes en prenant vos propres décisions. Toutefois, je vous accompagnerai toujours de ma sympathie et de mon intérêt. Quand vous arriverez à des conclusions sur ces affaires d'importance non-spirituelle, et pourvu que vous soyez tous d'accord, je vous garantis d'avance ma pleine approbation et ma sincère coopération. Maintenant, pour ne pas vous gêner dans vos délibérations, je vous quitte pour quinze jours. Ne vous inquiétez pas de moi. Je m'occuperai des affaires de mon Père, car nous avons d'autres royaumes en dehors de celui-ci.
Après avoir ainsi parlé, Jésus descendit la pente de la montagne, et ils ne le virent plus pendant deux semaines entières. Ils ne surent jamais où il était allé ni ce qu'il avait fait durant ces jours-là. Il fallut quelque temps aux vingt-quatre pour s'atteler sérieusement à l'étude de leurs problèmes, tant ils étaient déconcertés par l'absence du Maître. Toutefois, au bout d'une semaine, ils se retrouvèrent au coeur de leurs discussions, sans pouvoir faire appel à l'aide de Jésus.
La première question sur laquelle le groupe se mit d'accord fut l'adoption de la prière que Jésus leur avait si récemment apprise. Ils votèrent à l'unanimité d'accepter cette prière comme celle qui devait être enseignée aux croyants par les deux groupes d'apôtres.
Ils décidèrent ensuite qu'aussi longtemps que Jean vivrait, soit en prison soit en liberté, les deux groupes de douze apôtres poursuivraient leur propre travail et tiendraient tous les trois mois des réunions d'une semaine en des lieux à convenir de temps en temps.
Leur problème le plus sérieux était la question du baptême. Leurs difficultés étaient d'autant plus graves que Jésus avait refusé de faire une déclaration quelconque sur le sujet. Ils parvinrent finalement à l'accord suivant: « Tant que Jean vivrait, ou tant qu'ils n'auraient pas éventuellement modifié cette décision, seuls les apôtres de Jean baptiseraient les croyants et seuls les apôtres de Jésus instruiraient définitivement les nouveaux disciples. En conséquence, depuis ce moment-là et jusqu'après la mort de Jean, deux apôtres de Jean accompagnèrent Jésus et ses apôtres pour baptiser les croyants, car le conseil conjoint avait voté unanimement que le baptême deviendrait l'étape initiale dans l'alliance des étrangers avec les affaires du royaume.
Il fut ensuite convenu que si Jean mourait, les apôtres de Jean se présenteraient à Jésus et se soumettraient à ses directives; ils cesseraient alors de baptiser, à moins d'y être autorisés par Jésus ou ses apôtres.
Ils votèrent ensuite qu'au cas où Jean mourrait, les apôtres de Jésus commenceraient à baptiser avec de l'eau en symbole du baptême de l'Esprit divin. La repentance devait-elle ou non être attachée à la prédication du baptême? La question fut laissée au choix de chacun, et aucune décision obligatoire pour le groupe ne fut prise. Les apôtres de Jean prêchaient: «Repentez-vous et soyez baptisés », et les apôtres de Jésus proclamaient: «Croyez et soyez baptisés ».
Telle est l'histoire de la première tentative des disciples de Jésus pour coordonner des efforts divergents, régler des différences d'opinion, organiser des entreprises collectives, légiférer sur des observances extérieures, et rendre sociales les pratiques religieuses personnelles.
Ils étudièrent bien d'autres questions mineures et se mirent unanimement d'accord sur les solutions. Ces vingt-quatre hommes eurent une expérience vraiment remarquable pendant les deux semaines où ils furent obligés d'affronter les problèmes et de régler les difficultés sans Jésus. Ils apprirent à différer d'opinion, à discuter, à lutter, à prier, et à transiger, tout en respectant le point de vue de l'interlocuteur et en maintenant au moins un certain degré de tolérance pour ses opinions sincères.
L'après-midi de leur discussion finale sur les questions financières, Jésus revint, entendit leurs délibérations, écouta leurs décisions, et dit: «Telles sont donc vos conclusions; j'aiderai chacun de vous à mettre en pratique l'esprit de vos décisions communes ».
Deux mois et demi plus tard, Jean fut exécuté. Durant ce laps de temps, ses apôtres restèrent avec Jésus et les douze. Ils travaillèrent tous ensemble et baptisèrent des croyants au cours de cette période d'apostolat dans les villes de la Décapole. Le camp de Gilboa fut levé le 2 novembre de l'an 27.
7. - DANS LES VILLES DE LA DÉCAPOLE
Durant les mois de novembre et de décembre, Jésus et les vingt-quatre travaillèrent tranquillement dans les villes grecques de la Décapole, principalement à Scythopolis, Féras, Abila, et Gadara. Ce fut réellement la fin de la période préliminaire de reprise en mains de l'oeuvre et de l'organisation de Jean. La religion collective d'une nouvelle révélation doit toujours payer le prix du compromis avec les formes et usages établis de la religion précédente qu'elle cherche à sauver. Les disciples de Jésus durent accepter le principe du baptême pour entraîner avec eux, en tant que groupe religieux social, les disciples de Jean le Baptiste. Quant aux disciples de Jean, en se joignant à ceux de Jésus, ils renoncèrent à presque toutes leurs pratiques, sauf au baptême avec de l'eau.
Jésus enseigna peu en public au cours de cette mission dans les villes de la Décapole. Il passa beaucoup de temps à instruire les vingt-quatre et tint de nombreuses sessions spéciales avec les douze apôtres de Jean. Avec le temps, ils comprirent mieux pourquoi Jésus n'allait pas visiter Jean en prison et ne faisait aucun effort pour assurer sa libération. Mais ils ne purent jamais comprendre pourquoi Jésus n'accomplissait pas d'oeuvres miraculeuses, pourquoi il ne manifestait pas de signes extérieurs de son autorité divine. Avant de venir au camp de Gilboa, ils avaient surtout cru en lui à cause du témoignage de Jean, mais bientôt ils commencèrent à croire en lui par suite de leur propre contact avec le Maître et ses enseignements.
Durant ces deux mois, les membres du groupe travaillèrent la plupart du temps deux par deux, un apôtre de Jésus avec un apôtre de Jean. L'apôtre de Jean baptisait, l'apôtre de Jésus instruisait, et tous deux prêchaient l'évangile du royaume tel qu'ils le comprenaient. Et ils gagnèrent beaucoup d'âmes parmi les Juifs apostats et les Gentils.
Abner, chef des apôtres de Jean, devint un dévoué croyant en Jésus, qui le nomma plus tard chef d'un groupe de soixante-dix éducateurs chargés par le Maître de prêcher l'évangile.
8. - AU CAMP PRÈS DE PELLA
À la fin de décembre, ils allèrent tous près du Jourdain, à proximité de Pella, où ils recommencèrent à enseigner et à prêcher. Les Juifs et les Gentils venaient à ce camp pour entendre l'évangile. Un après-midi, pendant que Jésus enseignait la foule, certains amis intimes de Jean apportèrent au Maître le dernier message qu'il devait recevoir du Baptiste.
Jean était maintenant en prison depuis un an et demi, et durant presque tout ce temps-là Jésus avait travaillé très discrètement; il n'était donc pas étonnant que Jean s'inquiétât du royaume. Les amis de Jean interrompirent la leçon de Jésus en lui disant: « Jean le Baptiste nous a envoyés te demander si tu es vraiment le Libérateur ou si nous devons en chercher un autre ».
Jésus s'arrêta pour dire aux amis de Jean: « Retournez dire à Jean qu'il n'est pas oublié. Dites-lui ce que vous avez vu et entendu, que la bonne nouvelle est prêchée aux pauvres. Après avoir dit encore quelques mots aux messagers de Jean, Jésus se tourna à nouveau vers la foule et dit: « Ne croyez pas que Jean mette en doute l'évangile du royaume. Il s'enquiert seulement pour rassurer ses disciples qui sont aussi mes disciples. Jean n'est pas un faible. A vous qui avez entendu Jean prêcher avant qu'Hérode ne le mette en prison, laissez-moi vous demander ce que vous avez vu en lui. Un roseau secoué par le vent? Un homme d'humeur changeante et habillé de vêtements douillets? En règle générale, ceux qui sont vêtus somptueusement et vivent en sybarites se rencontrent dans les cours des rois et les châteaux des riches. Mais qu'avez-vous aperçu en voyant Jean? Un prophète? Oui, je vous le dis, et bien plus qu'un prophète. Il a été écrit de Jean Voici, j'envoie mon messager devant ta face; il préparera le chemin devant toi (1).
« En vérité, en vérité, je vous le dis, parmi ceux qui sont nés de femme, il ne s'en est pas élevé de plus grand que Jean le Baptiste; pourtant, même le plus petit dans le royaume des cieux est plus grand que lui, parce qu'il est né d'esprit et sait qu'il est devenu un fils de Dieu » (2).
Beaucoup de ceux qui entendirent Jésus ce jour-là se soumirent au baptême de Jean, proclamant ainsi publiquement leur entrée dans le royaume. Et depuis lors les apôtres de Jean restèrent étroitement liés à Jésus. Cette circonstance marqua l'union réelle des disciples de Jean et de ceux de Jésus.
Après que les messagers se furent entretenus avec Abner, ils partirent pour Macharée raconter tout cela à Jean, qui fut fortement encouragé et fortifié dans sa foi par les paroles de Jésus et le message d'Abner.
Ce même après-midi, Jésus continua à enseigner, disant: « A quoi comparerai-je cette génération? Beaucoup d'entre vous ne recevront ni le message de Jean ni mon enseignement. Vous ressemblez à des enfants jouant sur la place du marché, qui appellent leurs camarades et disent: « Nous avons joué de la flûte pour vous et vous n'avez pas dansé; nous avons gémi et vous ne vous êtes pas affligés ». Il en est de même pour certains d'entre vous. Jean est venu, ne mangeant pas et ne buvant pas, et ils ont dit qu'il était possédé par un démon. Le Fils de l'Homme vient, mangeant et buvant, et les mêmes personnes disent: « Voyez, il est un gourmand et un buveur de vin, un ami des publicains et des pêcheurs! » En vérité, les enfants de la sagesse légitiment la sagesse.
« Il semble que le Père céleste ait caché quelques-unes de ces vérités aux intelligents et aux arrogants, tandis qu'il les a dévoilées à de petits enfants (3). Mais le Père fait bien toutes choses; il se révèle à l'univers par les méthodes de son propre choix. Venez donc, vous tous qui peinez et portez de lourds fardeaux, et vous trouverez du repos pour votre âme. Prenez sur vous le joug divin, et vous éprouverez l'indicible paix de Dieu » (4).
| (1) Malachie III-1. | |
| (2) Cf. Matthieu XI-11 | |
| (3) Cf. Matthieu XI-25. | |
| (4) Cf. Matthieu XI-28 à 30. |
9. - LA MORT DE JEAN LE BAPTISTE
Jean le Baptiste fut exécuté par ordre d'Hérode Antipas le soir du 10 janvier de l'an 28. Le lendemain, quelques disciples de Jean qui étaient allés à Macharée entendirent parler de l'exécution. Ils allèrent trouver Hérode et réclamèrent le corps, qu'ils placèrent dans une sépulture. Plus tard, ils l'inhumèrent à Sébaste, le village où habitait Abner. Le lendemain 12 janvier, ils partirent vers le nord, en direction du camp des apôtres de Jean et de Jésus près de Pella, et racontèrent à Jésus la mort de Jean. Jésus écouta leur rapport, congédia la multitude, appela les vingt-quatre autour de lui, et leur dit: « Jean est mort. Hérode l'a fait décapiter. Tenez ensemble ce soir une séance de conseil, et arrangez vos affaires en conséquence. Il n'y aura plus de délai. L'heure est venue de proclamer le royaume ouvertement et énergiquement. Demain nous irons en Galilée ».
De bonne heure le matin du 13 janvier, Jésus et les apôtres, accompagnés de quelque vingt-cinq disciples, se rendirent à Capharnaüm et logèrent pour la nuit dans la maison de Zébédée.
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TRAVERSÉE DE LA SAMARIE
À la fin de juin de l'an 27, à cause de l'opposition croissante des chefs religieux juifs, Jésus et les douze quittèrent Jérusalem après avoir envoyé leurs tentes et leurs maigres effets personnels à la garde de Lazare à Béthanie. Allant vers le nord en Samarie, ils s'arrêtèrent à Béthel. Ils prêchèrent là durant plusieurs jours aux gens qui venaient de Gophna et d'Ephraïm. Un groupe de citoyens d'Arimathie et de Thamna vint inviter Jésus à visiter leurs villages. Le Maître et ses apôtres passèrent plus de quinze jours à enseigner les Juifs et les Samaritains de cette région, dont beaucoup venaient d'aussi loin qu'Antipatris pour entendre la bonne nouvelle de l'avènement du royaume.
Les populations de la Samarie du sud écoutèrent Jésus avec joie, et à l'exception de Judas Iscariot, les apôtres réussirent à vaincre une grande partie de leurs préjugés contre les Samaritains. Il était très difficile à Judas d'aimer ces Samaritains. La dernière semaine de juillet, Jésus et ses associés se préparèrent à partir pour les nouvelles villes grecques de Phasaélis et d'Archélaïs, proches du Jourdain.
1. -- PRÉDICATION À ARCHÉLAÏS
Durant la première quinzaine d'août, le groupe apostolique établit son quartier général dans les villes grecques d'Archélaïs et Phasaélis; il y fit sa première expérience de prédication à des rassemblements composés presque exclusivement de Gentils -- Grecs, Romains, et Syriens -- car il y avait peu d'habitants juifs dans ces deux villes grecques. Au contact de ces citoyens romains, les apôtres rencontrèrent de nouvelles difficultés à proclamer le message du royaume à venir et de nouvelles critiques des enseignements de Jésus. À l'une des nombreuses conférences du soir avec ses apôtres, Jésus écouta attentivement les objections à l'évangile du royaume rapportées par les douze à la suite de leurs expériences avec les gens touchés par leur travail personnel.
Une question posée par Philippe décrivait typiquement leurs difficultés. Philippe dit: « Maître, ces Grecs et ces Romains prennent notre message à la légère et disent que ces enseignements ne conviennent qu'à des chétifs et à des esclaves. Ils affirment que la religion des païens est supérieure à notre enseignement parce qu'elle incite à acquérir un caractère, fort, robuste, et vigoureux. Ils disent que nous cherchons à convertir tous les hommes en spécimens débiles de non-résistants passifs, inaptes à subsister longtemps sur terre. Ils t'aiment, Maître, et ils admettent largement que ton enseignement est céleste et idéal, mais ils refusent de nous prendre au sérieux. Ils affirment que ta religion n'est pas pour ce monde, que les hommes ne peuvent pas vivre selon ton enseignement. Maintenant, Maître, qu'allons-nous dire à ces Gentils? »
Après avoir entendu des objections similaires contre l'évangile du royaume présentées par Thomas, Nathanael, Simon Zélotès, et Matthieu, Jésus dit aux douze:
« Je suis venu dans ce monde pour faire la volonté de mon Père et pour révéler à toute l'humanité son caractère aimant. Cela, mes frères, c'est ma mission, et cette chose-là je la ferai sans me soucier que mes enseignements risquent d'être mal compris par les Juifs et les Gentils de notre époque ou d'une autre génération. Il ne devrait pas vous échapper que même l'amour divin a ses disciplines sévères. L'amour d'un père pour son fils oblige souvent le père à mettre un frein aux activités malencontreuses de son rejeton étourdi. L'enfant ne comprend pas toujours les motifs sages et affectueux de la discipline restrictive du Père. Mais je vous déclare que mon Père au Paradis gouverne effectivement un univers d'univers par le pouvoir contraignant de son amour. L'amour est la plus grande de toutes les réalités spirituelles. La vérité est une révélation libératrice, mais l'amour est la relation suprême. Quelles que soient les bévues de vos contemporains dans l'administration actuelle de leur monde, l'évangile que je vous proclame gouvernera ce même monde dans un âge à venir. Le but ultime du progrès humain consiste à reconnaître respectueusement la paternité de Dieu et à matérialiser affectueusement la fraternité des hommes.
« Qui vous a dit que mon évangile était destiné seulement à des esclaves et à des débiles? Vous, mes apôtres choisis, ressemblez-vous à des débiles? Jean avait-il une apparence chétive? Remarquez-vous que je sois esclave de la peur? Il est vrai que l'évangile est prêché aux pauvres et aux opprimés de cette génération. Les religions du monde les ont négligés, mais mon Père ne fait pas acception de personnes. En outre, les pauvres d'aujourd'hui sont les premiers à prêter attention à l'appel à la repentance et à accepter la filiation. L'évangile du royaume doit être prêché à tous les hommes -- Juifs et Gentils, Grecs et Romains, riches et pauvres, libres et esclaves -- et également aux jeunes et aux vieux, aux hommes et aux femmes.
« Parce que mon Père est un Dieu d'amour et se réjouit de pratiquer la miséricorde, ne vous imprégnez pas de l'idée que le service du royaume est d'une facilité monotone. L'ascension au Paradis est la suprême aventure de tous les temps, la rude obtention de l'éternité. Le service du royaume sur terre fera appel à toute la courageuse virilité que vous et vos collaborateurs pourrez rassembler. Beaucoup d'entre vous seront mis à mort à cause de votre fidélité à l'évangile de ce royaume. Il est facile de mourir au front, dans une guerre matérielle, quand votre courage est renforcé par la présence de vos camarades de combat, mais il faut une forme supérieure et plus profonde de courage et de dévouement pour sacrifier sa vie, calmement et tout seul, pour l'amour d'une vérité enchâssée dans le coeur humain.
« Aujourd'hui les incroyants peuvent vous reprocher avec mépris de prêcher un évangile de non-résistance et de vivre une vie de non-violence, mais vous êtes les premiers volontaires d'une longue lignée de croyants sincères à l'évangile de ce royaume, qui étonneront toute l'humanité par leur consécration héroïque à ces enseignements. Aucune armée n'a jamais déployé plus de courage et de bravoure que vous et vos loyaux successeurs n'en montreront en allant proclamer au monde entier la bonne nouvelle -- la paternité de Dieu et la fraternité des hommes. Le courage de la chair est la forme inférieure de bravoure. La bravoure mentale est un type plus élevé de courage humain, mais la bravoure supérieure et suprême est une fidélité intransigeante aux convictions éclairées sur les réalités spirituelles profondes. Ce courage constitue l'héroïsme des hommes qui connaissent Dieu. Or vous êtes tous des hommes qui connaissez Dieu; vous êtes même en vérité les associés personnels du Fils de l'Homme ».
Ceci n'est pas la totalité de ce que Jésus dit en cette occasion, mais c'est l'introduction de son discours. Il s'étendit ensuite longuement sur cette déclaration pour l'amplifier et l'illustrer. Ce fut l'une des allocutions les plus passionnées que Jésus ait jamais adressées aux douze. Le Maître parlait rarement à ses apôtres en laissant apparaître de la véhémence dans ses sentiments, mais ce fut une des rares circonstances où il parla avec une gravité manifeste accompagnée d'une émotion marquée.
Le résultat sur la prédication publique et le ministère personnel des apôtres fut immédiat; à partir de ce jour-là, leur message prit un nouveau ton de maîtrise courageuse. Les douze continuèrent à acquérir l'esprit positivement dynamique du nouvel évangile du royaume. Désormais, ils ne s'occupèrent plus autant de prêcher les vertus négatives et les injonctions passives de l'enseignement aux multiples facettes donné par leur Maître.
2. -- LEÇON SUR LA MAÎTRISE DE SOI
Jésus était un exemple, devenu parfait, d'un homme maître de soi. Quand il fut injurié, il n'injuria pas; quand il souffrit, il ne proféra aucune menace contre ses tortionnaires; quand il fut accusé par ses ennemis, il s'en remit simplement au juste jugement de son Père céleste.
À l'une des conférences du soir, André demanda à Jésus: « Maître, devons-nous pratiquer le renoncement à soi comme Jean nous l'a enseigné, ou devons-nous rechercher la maîtrise de soi comme tu l'enseignes? En quoi ton enseignement diffère-t-il de celui de Jean? » Jésus répondit:
« En vérité, Jean vous a enseigné la voie de la droiture conforme à la lumière et aux lois de ses ancêtres; c'était la religion de l'examen de conscience et du renoncement à soi. Mais je viens avec un nouveau message d'oubli de soi et de maîtrise de soi. Je vous montre le chemin de la vie tel que mon Père céleste me l'a révélé.
« En vérité, en vérité, je vous le dis, quiconque commande sa propre personnalité est plus grand que celui qui s'empare d'une ville. La maîtrise de soi est la mesure de la nature morale d'un homme et l'indice de son développement spirituel. Dans l'ancien ordre, vous pratiquiez le jeûne et la prière. En tant que créature nouvelle née d'esprit, vous apprenez à croire et à vous réjouir. Dans le royaume du Père, vous deviendrez de nouvelles créatures; les anciennes choses sombreront dans l'oubli; voici, je vous montre comment toutes choses doivent devenir nouvelles. Par votre amour réciproque, vous allez convaincre le monde que vous avez passé de l'esclavage à la liberté, de la mort à la vie éternelle.
« Par l'ancienne manière de faire, vous cherchez à supprimer, à obéir, et à vous conformer à des règles de vie; par la nouvelle méthode, vous êtes d'abord transformés par l'Esprit de Vérité, ce qui renforce votre âme intérieure par le constant renouvellement de votre pensée; vous êtes alors doués du pouvoir d'accomplir avec certitude et joie la gracieuse, acceptable, et parfaite volonté de Dieu. Ne l'oubliez pas -- c'est votre foi personnelle dans les promesses extrêmement grandes et précieuses de Dieu qui assure que vous partagerez la nature divine. Ainsi, par votre foi et la transformation de l'esprit, vous devenez en réalité les temples de Dieu, et son esprit habite réellement en vous. Si donc l'esprit demeure en vous, vous n'êtes plus des esclaves liés à la chair, mais des fils de l'esprit, libres et affranchis. La nouvelle loi spirituelle vous dote de la liberté due à la maîtrise de soi, qui remplace l'ancienne loi de la peur, la servitude de soi et l'esclavage du renoncement à soi-même.
« Maintes fois, quand vous avez mal agi, vous avez pensé à attribuer la responsabilité de vos actes à l'influence du malin, alors qu'en réalité vous vous êtes simplement laissé égarer par vos propres tendances naturelles. Le prophète Jérémie ne vous a-t-il pas dit jadis que le coeur humain est plus trompeur que tout, et même parfois désespérément pervers? Combien il est facile de vous tromper vous-mêmes et de vous adonner ainsi à des craintes stupides, à des plaisirs assujettissants, à la méchanceté, à l'envie, et même à une haine vengeresse?
« Le salut vient par la régénération de l'esprit, et non par les actes pharisaïques de la chair. Vous êtes justifiés par la foi et admis à la communion par la grâce, et non par la peur et le renoncement à la chair, bien que les enfants du Père qui sont nés d'esprit soient constamment et toujours maîtres d'eux-mêmes et de tout ce qui concerne les désirs de la chair. Quand vous savez que vous êtes sauvés par la foi, vous êtes réellement en paix avec Dieu. Tous ceux qui suivent la voie de cette paix céleste sont destinés à être sanctifiés dans le service perpétuel des fils toujours progressants du Dieu éternel. Dorénavant ce n'est plus un devoir, mais plutôt votre privilège exalté, que de vous purifier de tous les maux de la pensée et du corps tandis que vous cherchez à vous perfectionner dans l'amour de Dieu.
« Votre filiation est basée sur la foi, et vous devez rester insensibles à la peur. Votre joie est née de la confiance dans la parole divine; vous ne serez donc pas amenés à douter de la réalité de l'amour et de la miséricorde du Père. C'est la bonté même de Dieu qui conduit les hommes à un repentir sincère et authentique. Pour vous, le secret de la maîtrise de soi est lié à votre foi en l'esprit qui vous habite et qui opère toujours par amour. Et même cette foi qui sauve, vous ne l'avez pas par vous-mêmes; elle est aussi un don de Dieu. Si vous êtes les enfants de cette foi vivante, vous n'êtes plus les esclaves de vous-mêmes, mais plutôt les maîtres triomphants de vous-mêmes, les fils de Dieu affranchis.
« Si donc, mes enfants, vous êtes nés de l'esprit, vous êtes délivrés pour toujours de l'esclavage conscient d'une vie de renoncement et de surveillance perpétuelle des désirs de la chair; vous êtes transférés dans l'heureux royaume de l'esprit, d'où vous produisez spontanément les fruits de l'esprit dans votre vie quotidienne; or les fruits de l'esprit sont l'essence du type supérieur de contrôle de soi agréable et ennoblissant, allant jusqu'aux sommets de l'aboutissement humain -- la véritable maîtrise de soi.
3. -- DIVERSION ET DÉTENTE
À cette époque, un état de grande tension émotive et nerveuse se développa parmi les apôtres et parmi leurs disciples immédiatement associés. Ils ne s'étaient guère habitués à vivre et à travailler ensemble. Ils éprouvaient des difficultés croissantes à maintenir des relations harmonieuses avec les disciples de Jean. Le contact avec les Gentils et les Samaritains était une grande épreuve pour ces Juifs. En outre, les récents propos de Jésus avaient accru le trouble de leurs pensées. André était désemparé; ne sachant plus que faire, il alla trouver le Maître avec ses problèmes et ses perplexités. Lorsque Jésus eut entendu le chef apostolique lui raconter ses difficultés, il dit: « André, tu ne peux tirer les hommes de leur confusion par des explications quand ils se trouvent dans un pareil imbroglio et que tant de personnes éprouvant des sentiments violents sont impliquées. Je ne puis faire ce que tu me demandes -- je ne me mêlerai pas de ces difficultés sociales personnelles -- mais je me joindrai à vous pour jouir d'une période de trois jours de repos et de détente. Va vers tes frères, et annonce leur que vous allez tous monter avec moi sur le Mont Sartaba où je désire me reposer un jour ou deux.
« Maintenant, va trouver individuellement tes onze frères et dis leur à chacun: Le Maître désire que nous prenions, seuls avec lui, une période de repos et de détente. Nous avons tous éprouvé récemment beaucoup de tourments et de tension mentale; je suggère donc que durant ces vacances nous ne fassions aucune mention de nos épreuves et de nos difficultés. Puis-je compter sur toi pour coopérer avec moi dans cette affaire? Prends ainsi contact avec chacun de tes frères personnellement et en privé ». Et André fit ce que le Maître lui avait recommandé.
Ce fut une merveilleuse expérience pour chacun d'eux; ils n'oublièrent jamais cette journée d'ascension de la montagne. Durant tout le trajet, ils ne dirent presque rien de leurs difficultés. En arrivant au sommet du Mont Sartaba, Jésus les fit asseoir autour de lui et leur dit: « Mes frères, il faut que vous appreniez tous la valeur du repos et l'efficacité de la détente. Comprenez bien que la meilleure méthode pour résoudre certains problèmes embrouillés consiste à les laisser de côté pendant quelque temps. Ensuite, quand vous revenez rafraîchis par le repos ou l'adoration, vous êtes en mesure d'attaquer vos difficultés avec une tête plus claire et une main plus ferme, sans mentionner un coeur plus résolu. Par ailleurs, vous trouverez bien souvent que l'importance et les proportions de votre problème se sont amenuisées pendant que vous reposiez votre pensée et votre corps ».
Le lendemain, Jésus assigna à chacun des douze un thème de discussion. La journée entière fut consacrée à des souvenirs et à des conversations sur des sujets étrangers à leur apostolat. Ils furent momentanément choqués lorsque Jésus négligea même -- verbalement -- de dire ses grâces en rompant le pain pour leur déjeuner de midi. C'était la première fois qu'ils le voyaient omettre cette formalité.
Au cours de leur ascension de la montagne, la tête d'André était farcie de problèmes. Jean était démesurément perplexe dans son coeur. Jacques était cruellement troublé dans son âme. Matthieu était très à court d'argent parce que le groupe avait séjourné parmi les Gentils. Pierre était surmené et avait été récemment plus fantasque que d'habitude. Judas souffrait d'une attaque périodique de susceptibilité et d'égoïsme. Simon était anormalement bouleversé par ses efforts pour concilier son patriotisme avec l'amour de la confraternité humaine. Philippe était de plus en plus interloqué par la manière dont les événements se déroulaient. Nathanael avait moins d'humour depuis son contact avec la population des Gentils, et Thomas traversait une période de profonde dépression. Seuls les jumeaux étaient dans un état normal et ne s'inquiétaient de rien. Tous étaient très perplexes sur la manière de s'entendre paisiblement avec les disciples de Jean.
Le troisième jour, lorsqu'ils se remirent en route pour descendre de la montagne et revenir à leur camp, un grand changement s'était produit en eux. Ils avaient fait l'importante découverte que bien des perplexités humaines n'ont pas d'existence réelle, que beaucoup de difficultés pressantes sont les créations d'une peur exagérée et le résultat d'une appréhension excessive. Ils avaient appris que la meilleure manière de traiter ces ennuis consistait à les négliger. En s'en allant, ils avaient laissé ces problèmes se résoudre d'eux-mêmes.
Leur retour de ces vacances marque le commencement d'une période de relations considérablement améliorées avec les partisans de Jean. Une grande partie des douze céda réellement à l'hilarité lorsqu'ils notèrent le changement mental de chacun et observèrent l'absence d'irritation nerveuse dont ils bénéficiaient par suite de leurs trois jours de vacances loin de la routine des devoirs quotidiens de la vie. La monotonie des contacts humains risque toujours de multiplier sérieusement les perplexités et d'accroître les difficultés.
Dans les deux villes grecques d'Archélaïs et de Phasaélis, le nombre des Gentils qui crurent à l'évangile fut restreint, mais les douze apôtres gagnèrent une précieuse expérience dans ce premier travail important auprès de populations exclusivement païennes. Un lundi matin vers le milieu du mois, Jésus dit à André: « Pénétrons en Samarie ». Et les douze partirent immédiatement pour la ville de Sychar, près du puits de Jacob.
4. -- LES JUIFS ET LES SAMARITAINS
Depuis plus de six cents ans, les Juifs de Judée, et plus tard ceux de Galilée, avaient été en mauvais termes avec les Samaritains. Voici à peu près comment était née la discorde entre Juifs et Samaritains. Environ 700 ans avant J.-C., Sargon, roi d'Assyrie, réprima une révolte en Palestine centrale et emmena en captivité plus de vingt cinq mille Juifs du nord du royaume d'Israël. Il installa à leur place un nombre à peu près égal de descendants des Cuthites, des Sépharvites, et des Hamathites. Plus tard, Assurbanipal envoya encore d'autres colonies habiter la Samarie.
L'inimitié religieuse entre Juifs et Samaritains datait du retour de captivité des Juifs de Babylone, quand les Samaritains essayèrent d'empêcher la reconstruction de Jérusalem. Plus tard, ils offensèrent les Juifs en prêtant assistance aux armées d'Alexandre. En remerciement de leur amitié, Alexandre octroya aux Samaritains la permission de bâtir un temple sur le Mont Gérizim; ils y adorèrent Jéhovah et leurs dieux tribaux, et offrirent des sacrifices très semblables à ceux des services du temple à Jérusalem. Du moins continuèrent-ils ce culte jusqu'à l'époque des Macchabées, où Jean Hyrcanus détruisit leur temple du Mont Gérizim. Au cours de ses travaux en faveur des Samaritains après la mort de Jésus, l'apôtre Philippe tint de nombreuses réunions sur le lieu de cet ancien temple samaritain.
Les antagonismes entre Juifs et Samaritains étaient devenus classiques et historiques. Depuis l'époque d'Alexandre, les deux groupes avaient de moins en moins de rapports. Les douze apôtres ne répugnaient pas à prêcher dans les villes grecques et autres cités païennes de la Décapole et de la Judée, mais ce fut pour eux une rude épreuve de fidélité envers leur Maître quand celui-ci leur dit: « Allons en Samarie ». Toutefois, au cours de l'année qu'ils avaient passée avec Jésus, ils avaient acquis une forme de fidélité personnelle qui transcendait même leur foi dans ses enseignements et leurs préjugés contre les Samaritains.
5. -- LA FEMME DE SYCHAR
Lorsque le Maître et les douze arrivèrent au puits de Jacob, Jésus était fatigué du voyage et s'arrêta près du puits, tandis que Philippe emmenait les apôtres à Sychar pour l'aider à rapporter des vivres et des tentes, car ils se proposaient de demeurer quelque temps dans le voisinage. Pierre et les fils de Zébédée auraient bien voulu rester avec Jésus, mais il les pria d'accompagner leurs collègues en disant: « Ne craignez rien pour moi. Les Samaritains seront amicaux. Ce sont seulement nos frères, les Juifs, qui cherchent à nous faire du mal ». Il était à peu près six heures cette soirée d'été quand Jésus s'assit près du puits pour attendre le retour des apôtres.
L'eau du puits de Jacob était moins saline que celle des puits de Sychar; elle était donc très appréciée comme boisson. Jésus avait soif, mais ne disposait d'aucun moyen pour tirer de l'eau du puits. Aussi, lorsqu'une femme de Sychar arriva avec sa cruche et se prépara à puiser, Jésus lui dit: «Donne-moi un peu à boire ». Cette femme de Samarie savait que Jésus était un Juif à cause de son apparence et de ses vêtements, et elle supposa qu'il était un Juif de Galilée à cause de son accent. Elle s'appelait Nalda, et elle était une créature avenante. Elle fut très surprise de voir un homme juif lui parler ainsi près du puits et lui demander à boire, car en ces temps-là on n'estimait pas convenable pour un homme qui se respectait de parler en public à une femme, et encore bien moins pour un Juif d'adresser la parole à une Samaritaine. Nalda demanda donc à Jésus: « Comment se fait-il que toi, un Juif, tu me demandes à boire à moi, une Samaritaine? » Jésus répondit: « En vérité je t'ai demandé un peu à boire, mais si seulement tu pouvais comprendre, tu me demanderais une gorgée d'eau vivante ». Alors Nalda dit: «Mais tu n'as rien pour puiser, et le puits est profond. D'où tirerais-tu donc cette eau vivante? Es-tu plus grand que notre père Jacob qui nous donna ce puits, qui y but lui-même, et qui y fit aussi boire ses fils et son bétail? »
Jésus répliqua: « Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif, mais quiconque boit de l'eau de l'esprit vivant n'aura jamais soif. Cette eau vivante deviendra en lui une source de rafraîchissement qui jaillira jusque dans la vie éternelle ». Nalda dit alors: « Donne-moi de cette eau pour que je n'aie pas soif et que je n'aie plus besoin de faire tout ce chemin pour puiser. En outre, tout ce qu'une Samaritaine pourrait recevoir d'un homme aussi digne d'éloges que toi sera un plaisir ».
Nalda ne savait comment interpréter l'empressement de Jésus à lui parler. Elle voyait sur le visage du Maître l'expression d'un homme intègre et saint, mais elle prit sa bienveillance pour une familiarité ordinaire et interpréta faussement son symbolisme comme une manière de lui faire des avances. Étant une femme de moralité peu sévère, elle se disposait à devenir ouvertement coquette lorsque Jésus, la regardant droit dans les yeux, lui dit d'une voix impérative: « Femme, va chercher ton mari et amène-le ici ». Ce commandement ramena Nalda au sens des réalités. Elle vit qu'elle avait mal jugé la bonté du Maître et perçut qu'elle avait mal interprété le sens de ses paroles. Elle eut peur; elle commença à comprendre qu'elle se trouvait en face d'une personne exceptionnelle et chercha à l'aveuglette dans sa pensée une réponse appropriée. En grande confusion elle dit: « Mais, Monseigneur, je ne puis appeler mon mari, car je n'ai pas de mari ». Alors Jésus reprit: « Tu as dit la vérité, car tu as peut-être eu jadis un mari, mais l'homme avec qui tu vis maintenant n'est pas ton mari. Il vaudrait mieux que tu cesses de prendre mes paroles à la légère et que tu recherches l'eau vivante que je t'ai offerte aujourd'hui ».
Nalda fut alors dégrisée, et son moi supérieur fut éveillé. Ce n'était pas entièrement de son gré qu'elle était une femme immorale. Elle avait été brutalement et injustement rejetée par son mari et réduite à la misère; elle avait alors consenti à vivre avec un Grec, mais sans mariage régulier. Nalda se sentait maintenant très honteuse d'avoir si étourdiment parlé à Jésus. Fort contrite, elle dit alors au Maître: « Mon Seigneur, je me repens de la manière dont je t'ai parlé, car je perçois que tu es un saint homme et peut-être un prophète ». Elle était sur le point de demander une aide directe et personnelle au Maître lorsqu'elle fit ce que tant de personnes ont fait avant et après elle -- elle éluda la question du salut personnel en s'orientant vers une discussion de théologie et de philosophie. Elle détourna rapidement la conversation ayant trait à sa personne vers une controverse théologique. Montrant du doigt le Mont Gérizim, elle continua en disant: « Nos pères adoraient sur cette montagne, et cependant toi tu dis que le lieu où les hommes devraient adorer se trouve à Jérusalem; où donc est le bon endroit pour adorer Dieu? »
Jésus perçut la tentative de l'âme de la femme pour éviter un contact direct et scrutateur avec son Créateur, mais il vit aussi la présence dans cette âme d'un désir de connaître la meilleure manière de vivre. Après tout, il y avait dans le coeur de Nalda une véritable soif d'eau vive. Il la traita donc avec patience en disant: « Femme, laisse-moi te dire que le jour vient bientôt où tu n'adoreras le Père ni sur cette montagne ni à Jérusalem. Tu adores actuellement quelque chose que tu ne connais pas, un mélange de la religion de nombreux dieux païens et de la philosophie des Gentils. Les Juifs au moins savent qui ils adorent; ils ont dissipé toute confusion en concentrant leur adoration sur un seul Dieu, Jéhovah. Tu devrais me croire quand je dis que l'heure viendra bientôt -- elle est même déjà venue -- où tous les adorateurs sincères adoreront le Père en esprit et en vérité, car ce sont précisément de tels adorateurs que le Père recherche. Dieu est esprit, et ceux qui l'adorent doivent l'adorer en esprit et en vérité. Tu n'obtiendras pas le salut en connaissant simplement un lieu de culte ou la manière dont les autres devraient adorer. Ton salut viendra quand tu recevras dans ton propre coeur l'eau vivante que je t'offre dès maintenant ».
Mais Nalda tenta encore un effort pour éluder la discussion du problème embarrassant de sa propre vie sur terre et du statut de son âme devant Dieu. Une fois de plus elle recourut à des questions générales sur la religion en disant: « Oui, je sais que Jean a prêché au sujet de la venue du « Convertisseur », celui que l'on appellera le Libérateur, et que, lors de sa venue, il nous annoncera toutes choses -- ». Interrompant Nalda, Jésus lui dit avec une assurance impressionnante: « Moi qui te parle, je suis celui-là ».
C'était la première proclamation de sa nature et de sa filiation divines que Jésus eût fit faite directement, positivement, et ouvertement sur terre. Et elle fut faite à une femme, à une Samaritaine, et à une femme dont la réputation était jusqu'alors douteuse aux yeux des hommes. Mais l'oeil divin voyait plus en cette femme une victime du péché des autres qu'une pécheresse volontaire; elle était maintenant une âme humaine qui désirait le salut; elle le souhaitait sincèrement et de tout coeur, et cela suffisait.
Nalda était sur le point d'exprimer son ardent désir personnel pour des choses meilleures, mais juste au moment où elle allait exposer le véritable désir de son coeur, les douze apôtres revinrent de Sychar. Arrivant sur la scène où Jésus parlait si intimement avec cette femme -- une Samaritaine et une femme seule -- ils furent plus qu'étonnés. Ils déposèrent rapidement leurs approvisionnements et s'écartèrent, nul n'osant faire d'observations à Jésus tandis qu'il disait à Nalda: « Femme, va ton chemin; Dieu t'a pardonné. Tu vivras désormais une nouvelle vie. Tu as reçu l'eau vivante; une joie nouvelle jaillira dans ton âme et tu deviendras une fille du Très-Haut ». Percevant la désapprobation des apôtres, la femme abandonna sa cruche et s'enfuit vers la ville.
En y entrant, elle déclara à tous ceux qu'elle rencontra: « Sortez vers le puits de Jacob et allez y vite, car vous y rencontrerez un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait dans ma vie. Pourrait-il être le Convertisseur? » Avant le coucher du soleil, une foule de gens s'était rassemblée au puits de Jacob pour entendre Jésus. Et le Maître leur développa le sujet de l'eau vivante, le don de l'esprit intérieur.
Les apôtres ne cessèrent jamais d'être choqués par l'empressement de Jésus à parler aux femmes, à des femmes de réputation douteuse, ou même immorales. Il fut très difficile à Jésus d'enseigner à ses apôtres que les femmes, même qualifiées d'immorales, ont une âme qui peut choisir Dieu pour Père, et qu'elles peuvent devenir ainsi des filles de Dieu candidates à la vie éternelle. Même dix-neuf siècles plus tard, bien des gens montrent la même répugnance à saisir les enseignements du Maître. La religion chrétienne elle-même a été bâtie avec persistance autour du fait de la mort du Christ au lieu de l'être autour de la vérité de sa vie. Le monde devrait s'occuper davantage de sa vie bienfaisante, révélatrice de Dieu, que de sa mort tragique et désolante.
Le lendemain, Nalda raconta toute l'histoire à l'apôtre Jean, mais il ne la révéla jamais entièrement aux autres apôtres, et Jésus ne leur donna pas de détails.
Nalda informa Jean que Jésus lui avait dit « tout ce qu'elle avait fait dans sa vie ». Jean eut souvent envie d'interroger Jésus sur son entretien avec Nalda, mais ne le fit jamais. Jésus n'avait dit à la Samaritaine qu'une seule chose sur elle-même, mais son regard planté dans ses yeux et la manière dont il l'avait traitée avaient fait repasser en un instant dans la pensée de Nalda une revue panoramique de sa vie accidentée, si bien qu'elle associa toute cette rétrospection de sa vie passée avec le regard et les paroles du Maître. Jésus ne lui avait jamais dit qu'elle avait eu cinq maris. Elle avait vécu avec quatre hommes différents depuis que son mari l'avait répudiée. Au moment où elle comprit clairement que Jésus était un homme de Dieu, ce fait et tout son passé lui revinrent à la mémoire avec tant de vivacité qu'elle répéta ultérieurement à Jean que Jésus lui avait réellement tout raconté sur elle-même.
6. -- LE RENOUVEAU RELIGIEUX EN SAMARIE
À la fin du jour où Nalda attira la foule hors de Sychar pour voir Jésus, les douze venaient d'arriver de Sychar avec le ravitaillement. Ils supplièrent Jésus de manger avec eux au lieu de parler à la population, car ils n'avaient rien pris de toute la journée et ils avaient faim. Mais Jésus savait que l'obscurité allait bientôt les envelopper, de sorte qu'il persista dans sa détermination de parler aux gens rassemblés avant de les renvoyer. Lorsqu'André essaya de le persuader de manger un morceau avant de parler à la foule, Jésus dit: « J'ai un aliment à manger que vous ne connaissez pas ». Quand les apôtres entendirent cela, ils se dirent entre eux: « Quelqu'un lui a-t-il apporté quelque chose à manger? Se peut-il que la femme lui ait donné de la nourriture en même temps que de l'eau? » Lorsque Jésus les entendit parler entre eux, il alla vers les douze avant de haranguer la multitude et leur dit: « Mon aliment est de faire la volonté de Celui qui m'a envoyé et d'accomplir Son travail. Vous devriez cesser de dire qu'il y a encore tant et tant de temps avant la moisson. Voyez ces gens qui sortent d'une ville de Samarie pour nous entendre; je vous dis que les champs ont déjà blanchi pour la moisson. Celui qui récolte reçoit des gages et rassemble ce fruit pour la vie éternelle; en conséquence, les semeurs et les moissonneurs se réjouissent ensemble, car c'est en ceci que réside la vérité du dicton: l'un sème et l'autre récolte. Je vous envoie maintenant pour faire une récolte à laquelle vous n'avez pas travaillé; d'autres ont peiné, et vous allez bénéficier de leur travail ». Il disait cela en se référant aux prédications de Jean le Baptiste.
Jésus et les apôtres allèrent à Sychar et prêchèrent deux jours avant d'établir leur camp sur le Mont Gérizim. Beaucoup d'habitants de Sychar crurent à l'évangile et demandèrent à être baptisés, mais les apôtres de Jésus ne baptisaient pas encore.
Lors de la première nuit de campement sur le Mont Gérizim, les apôtres s'attendaient à des reproches de Jésus en raison de leur comportement envers la femme au puits de Jacob, mais il ne fit aucune allusion à la question. Au lieu de cela, il leur fit la mémorable causerie sur « Les réalités qui sont centrales dans le royaume de Dieu ». Dans chaque religion, il est très facile de laisser certaines valeurs devenir disproportionnées et de permettre à des faits d'occuper, en théologie, la place de la vérité. En fait, la croix est devenue le centre même du christianisme ultérieur, mais elle n'est pas la vérité centrale de la religion que l'on peut tirer de la vie et des enseignements de Jésus de Nazareth. (pas en gras dans le texte original)
Le thème de l'enseignement de Jésus sur le Mont Gérizim fut le suivant: il désirait que tous les hommes voient Dieu comme un Père-ami, de même que lui (Jésus) est un frère-ami. Maintes et maintes fois il leur inculqua que l'amour est le plus grand lien dans le monde -- dans l'univers -- de même que la vérité est la plus grande proclamation de l'observance de ce lien divin.
Jésus affirma pleinement sa personnalité aux Samaritains parce qu'il pouvait le faire en sécurité, et parce qu'il savait qu'il ne reviendrait plus jamais au coeur de la Samarie prêcher l'évangile du royaume.
Jésus et les douze campèrent sur le Mont Gérizim jusqu'à la fin d'août. Durant la journée, ils prêchaient la bonne nouvelle -- la paternité de Dieu -- aux Samaritains, et ils passaient la nuit au camp. Le travail que Jésus et les douze firent dans les villes de Samarie amena quantité d'âmes au royaume et contribua grandement à préparer la voie à l'oeuvre merveilleuse de Philippe dans ces régions, après la mort et la résurrection de Jésus et après la dispersion des apôtres aux confins de la terre par suite de la cruauté avec laquelle les croyants furent persécutés à Jérusalem.
7. -- ENSEIGNEMENTS SUR LA PRIÈRE ET LE CULTE
Aux conférences du soir sur le Mont Gérizim, Jésus enseigna nombre de grandes vérités; il insista en particulier sur les suivantes:
1. La vraie religion est l'activité d'une âme individuelle dans ses relations auto-conscientes avec le Créateur. La religion organisée est la tentative des hommes pour rendre collectif le culte des personnes religieuses individuelles.
2. L'adoration la contemplation du monde de l'esprit doit alterner avec le service, avec le contact de la réalité matérielle.
Le travail doit alterner avec les divertissements; la religion devrait avoir l'humour pour contrepoids. La philosophie profonde devrait être relayée par la poésie rythmique. Le surmenage de la vie -- la tension de la personnalité dans le temps -- devrait être allégé par le repos que procure l'adoration.
Le sentiment d'insécurité né de la peur de l'isolement de la personnalité dans l'univers devrait avoir pour antidote la contemplation du Père au moyen de la foi et les tentatives pour concevoir clairement le Suprême.
3. La prière est destinée à moins faire réfléchir les hommes et à mieux leur faire comprendre la vérité. Elle n'est pas destinée à provoquer l'accroissement des connaissances, mais plutôt l'expansion de la clairvoyance.
4. L'adoration a pour but d'anticiper sur la vie meilleure qui nous attend, et d'en refléter ensuite les nouvelles significations spirituelles sur la vie actuelle. La prière est un soutien spirituel, mais l'adoration est divinement créative.
5. L'adoration est la technique consistant à se tourner vers l'Être Unique pour recevoir l'inspiration permettant de servir la multitude. L'adoration est l'étalon qui mesure le degré auquel l'âme s'est détachée de l'univers matériel et s'est attachée simultanément en sécurité aux réalités spirituelles de toute la création.
6. La prière est la réminiscence du moi supérieur -- la pensée sublime. L'adoration est l'oubli de soi -- la super-pensée. L'adoration est l'attention sans effort, le vrai repos idéal de l'âme, une forme d'exercice spirituel reposant.
7. L'adoration est l'acte d'une fraction qui s'identifie avec le Tout, le fini avec l'Infini, le fils avec le Père; le temps consiste à emboîter le pas à l'éternité. L'adoration est la communion personnelle du fils avec le Père divin, l'imagination par l'âme et l'esprit humains de comportements reposants, créatifs, fraternels, et romanesques.
Les apôtres ne comprirent qu'une faible partie des enseignements du Maître au camp, mais les habitants de certaines autres planètes les comprirent aussitôt et de nouvelles générations les comprendront sur Urantia.
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- Category: 4. LA VIE ET LES ENSEIGNEMENTS DE JÉSUS
LA PÂQUE À JÉRUSALEM
DURANT le mois d'avril, Jésus et les apôtres travaillèrent à Jérusalem, en sortant de la ville tous les soirs pour se reposer la nuit à Béthanie. Toutefois, Jésus passait une ou deux nuits par semaine à Jérusalem chez Flavius, un Juif grec chez qui beaucoup de Juifs éminents venaient le consulter en secret.
Au cours de sa première journée à Jérusalem, Jésus annonça sa visite à l'ancien grand-prêtre Annas, son ami d'autrefois, un parent de Salomé, femme de Zébédée. Annas avait entendu parler de Jésus et de ses enseignements, et lorsque Jésus se présenta chez le grand-prêtre, il fut reçu avec beaucoup de réserve. Quand Jésus perçut la froideur d'Annas, il prit immédiatement congé et lui dit en partant: « C'est principalement la peur qui rend les hommes esclaves, et l'orgueil qui est leur grande faiblesse. Te trahiras-tu toi-même en te faisant esclave de ces deux destructeurs de la joie et de la liberté? » Mais Annas ne répondit rien, et le Maître ne le revit plus jusqu'au moment où Annas siégea avec son gendre pour juger le Fils de l'Homme.
1. -- ENSEIGNEMENT DANS LE TEMPLE
Durant tout ce mois, Jésus ou l'un de ses apôtres enseignèrent quotidiennement dans le temple. Quand les foules de la Pâque étaient trop nombreuses pour avoir accès à l'enseignement du temple, les apôtres organisaient de nombreux groupes éducatifs en dehors de l'enceinte sacrée. Voici l'essentiel de leur enseignement:
| 1. Le royaume des cieux est à portée de la main. |
| 2. En ayant foi dans la paternité de Dieu, vous pouvez entrer dans le royaume des cieux et devenir ainsi les fils de Dieu. |
| 3. L'amour est la règle de vie dans le royaume -- être suprêmement dévoué à Dieu, tout en aimant son prochain comme soi-même. |
| 4. L'obéissance à la volonté du Père produit les fruits de l'esprit dans votre vie personnelle; elle est la loi du royaume. |
Les multitudes qui venaient célébrer la Pâque entendaient cet enseignement, et des centaines d'auditeurs se réjouissaient de la bonne nouvelle. Les chefs civils et religieux des Juifs commencèrent à se préoccuper sérieusement de l'activité de Jésus et de ses apôtres; ils examinèrent entre eux la conduite à tenir vis à vis du groupe apostolique.
En plus de leur enseignement dans le temple et au dehors, les apôtres et autres croyants faisaient beaucoup de travail personnel parmi les foules de la Pâque. Les hommes et les femmes touchés par le message de Jésus lors de la célébration de cette Pâque en répandirent la nouvelle jusqu'aux frontières les plus lointaines de l'empire romain, et aussi en Orient. Ce fut le commencement de la diffusion de l'évangile du royaume à l'étranger. L'oeuvre de Jésus n'était plus limitée à la Palestine.
2. -- LA COLÈRE DE DIEU
Il y avait à Jérusalem, assistant aux festivités de la Pâque, un riche négociant juif de Crète nommé Jacob qui aborda André et lui demanda de voir Jésus en privé. André arrangea une rencontre secrète chez Flavius pour le lendemain soir. Ce Jacob ne pouvait comprendre les enseignements du Maître et venait par désir de se renseigner plus complètement sur le royaume de Dieu. Il dit à Jésus: « Rabbi, Moïse et les anciens prophètes nous disent que Jéhovah est un Dieu jaloux, un Dieu très courroucé et d'une colère féroce. Les prophètes disent qu'il hait les pécheurs et se venge de ceux qui n'obéissent pas à sa loi. Toi et tes disciples vous nous enseignez au contraire que Dieu est un Père compatissant et bon, qui aime tellement les hommes qu'il voudrait les accueillir tous dans ce nouveau royaume céleste que tu proclames si proche ».
Lorsque Jacob eut fini de parler, Jésus répondit: « Jacob, tu as bien exposé les enseignements des prophètes de jadis qui instruisirent les enfants de leur génération conformément aux lumières de leur temps. Notre Père au Paradis est invariant, mais le concept de sa nature s'est élargi et accru depuis l'époque de Moïse jusqu'à l'époque d'Amos, et même jusqu'à la génération du prophète Isaïe. Maintenant je me suis incarné pour révéler le Père dans une nouvelle gloire et annoncer son amour et sa miséricorde à tous les hommes sur tous les mondes. À mesure que l'évangile de ce royaume se répandra sur terre avec son message de courage et de bonne volonté à tous les hommes, il s'établira des relations meilleures chez les familles de toutes les nations. Le temps passant, les pères et les enfants s'aimeront davantage les uns les autres, ce qui amènera une meilleure compréhension de l'amour du Père céleste pour ses enfants terrestres. Rappelle-toi, Jacob, qu'un père sincère et bon non seulement aime sa famille collectivement en tant que famille -- mais aussi qu'il en aime individuellement chaque membre et prend de lui un soin affectueux ».
Après une discussion prolongée sur le caractère du Père céleste, Jésus s'arrêta pour dire: « Toi, Jacob, qui es père d'une famille nombreuse, tu connais bien la vérité de mes paroles ». Et Jacob dit: « Mais, Maître, qui t'a dit que j'étais le père de six enfants? Comment as-tu su cela à mon sujet? » Et le Maître répliqua: « Il suffit de dire que le Père et le Fils connaissent toutes choses, car en vérité ils voient tout. Aimant tes enfants comme un père terrestre, il faut maintenant que tu acceptes comme une réalité l'amour du Père céleste pour toi -- non pas simplement pour tous les enfants d'Abraham, mais pour toi, pour ton âme individuelle ».
Jésus poursuivit: « Quand tes enfants sont très jeunes et que tu dois les punir, ils peuvent penser que leur père est courroucé, plein de rancune et de colère. Leur manque de maturité ne leur permet pas de pénétrer au delà de la punition pour discerner l'affection prévoyante et corrective du Père. Mais quand ces mêmes enfants deviennent des hommes et des femmes, ne serait-il pas insensé de leur part de s'attacher à ces anciennes et fausses conceptions au sujet de leur père? À mesure que les siècles s'écoulent, l'humanité ne devrait-elle pas mieux comprendre la vraie nature et le caractère aimant du Père qui est aux cieux? Quel profit tires-tu de l'illumination spirituelle des générations successives si tu persistes à envisager Dieu comme Moïse et les prophètes? Je te dis, Jacob, qu'à la brillante lumière de cette heure, tu devrais voir le Père comme aucun de tes prédécesseurs ne l'a jamais aperçu. En le voyant ainsi, tu devrais te réjouir d'entrer dans le royaume où règne un Père aussi miséricordieux, et tu devrais veiller à ce que sa volonté d'amour domine désormais ta vie ».
Et Jacob répondit: « Rabbi, je crois, et je désire que tu me conduises dans le royaume du Père ».
3. -- LE CONCEPT DE DIEU
Ce soir-là les douze apôtres, dont la plupart avaient écouté cette analyse du caractère de Dieu, posèrent à Jésus de nombreuses questions sur le Père qui est aux cieux. La meilleure manière de présenter les réponses du Maître à ces questions consiste à les résumer en terminologie moderne.
Jésus réprimanda doucement les douze en leur disant en substance: « Ne connaissez-vous pas les traditions d'Israël se rapportant à la croissance de l'idée de Jéhovah, et ignorez-vous l'enseignement des Écritures concernant la doctrine de Dieu? » Puis le Maître se mit à instruire les apôtres sur l'évolution du concept de Dieu tout au long du développement du peuple juif. Il attira leur attention sur les phases suivantes de la croissance de l'idée de Dieu:
1. Jéhovah -- le dieu des clans du Sinaï. C'était le concept primitif de la Déité que Moïse éleva au niveau supérieur de Seigneur Dieu d'Israël. Le Père céleste ne manque jamais d'accepter l'adoration sincère de ses enfants terrestres, si rudimentaire que soit leur concept de la Déité ou le nom par lequel ils symbolisent sa divine nature.
2. Le Très Haut. Ce concept du Père céleste fut proclamé à Salem par Melchizédek à Abraham, et transmis au loin par ceux qui crurent ultérieurement à cette idée agrandie et élargie de la Déité. Abraham et son frère avaient quitté Ur parce que l'adoration du soleil y avait été instaurée. Ils crurent à El Elyon -- le Dieu Très Haut -- enseigné par Melchizédek. Ils avaient une conception mixte de Dieu, consistant en un mélange de leurs anciennes idées mésopotamiennes et de la doctrine du Très Haut.
3. El Shaddai. À cette époque reculée, beaucoup d'Hébreux adoraient El Shaddai, le concept égyptien du Dieu du ciel, concept qu'ils avaient appris à connaître durant leur captivité dans le territoire du Nil. Longtemps après l'époque de Melchizédek, ces trois conceptions de Dieu se fondirent en une seule et formèrent la doctrine de la Déité créatrice, le Seigneur Dieu d'Israël.
4. Elohim. Depuis l'époque d'Adam, l'enseignement de la Trinité du Paradis a subsisté. Rappelez-vous que les Écritures commencent par affirmer que « Au commencement les Dieux créèrent les cieux et la terre » (1). Cela dénote qu'au moment où ce passage fut rédigé, le concept trinitaire de trois Dieux en un avait trouvé place dans la religion de nos ancêtres.
(1) Cf. Genèse I-1. La Bible classique emploie le singulier: Dieu créa les cieux et la terre.
5. Le Suprême Jéhovah. À l'époque d'Isaïe, ces croyances au sujet de Dieu s'étaient élargies en un concept du Créateur Universel à la fois tout-puissant et infiniment miséricordieux. Ce concept évoluant et grandissant de Dieu supplanta finalement toutes les idées antérieures sur la Déité dans la religion de nos pères.
6. Le Père qui est aux cieux. Maintenant nous connaissons Dieu comme notre Père céleste. Notre enseignement fournit une religion où le croyant est un fils de Dieu. Telle est la bonne nouvelle de l'évangile du royaume céleste. Le Fils et l'Esprit coexistent avec le Père, et la révélation de la nature et du ministère de ces Déités du Paradis continuera à s'élargir et à s'éclaircir au cours des âges sans fin de la progression spirituelle éternelle des fils ascendants de Dieu. En tous temps et au long des âges, l'adoration sincère de tout être humain -- quant au progrès spirituel individuel -- est reconnue par l'esprit intérieur comme un hommage rendu au Père qui est aux cieux.
Jamais auparavant les apôtres n'avaient été aussi choqués qu'en entendant raconter cette croissance du concept de Dieu dans la pensée juive des générations antérieures; ils étaient trop désemparés pour poser des questions. Tandis qu'ils restaient assis en silence devant Jésus, le Maître poursuivit: «Vous auriez connu ces vérités si vous aviez étudié les Écritures. N'avez-vous pas lu le passage de Samuel disant: « Et la colère du Seigneur s'embrasa contre les Israélites, au point qu'il excita David contre eux en disant: Va dénombrer Israël et Juda? (2)» Ce n'était pas étonnant, car à l'époque de Samuel les enfants d'Abraham croyaient réellement que Jéhovah avait créé à la fois le bien et le mal. Mais lorsqu'un écrivain ultérieur narra ces événements après l'agrandissement du concept juif de la nature de Dieu, il n'osa pas attribuer le mal à Jéhovah, et c'est pourquoi il dit: « Et Satan s'éleva contre Israël et incita David à dénombrer les Israélites » (3). Ne pouvez-vous discerner que ces passages des Écritures montrent clairement comment le concept de la nature de Dieu continua à grandir de génération en génération?
| (2) 2 Samuel XXIV-1. |
| (3) 1 Chroniques XXI-1. |
« Vous devriez aussi avoir discerné la croissance de la compréhension de la loi divine en parfaite harmonie avec ces conceptions grandissantes de la divinité. Quand les enfants d'Israël sortirent d'Égypte à une date antérieure à la révélation élargie de Jéhovah, ils avaient reçu dix commandements qui leur servirent de loi jusqu'à l'époque où ils campèrent devant le Sinaï, et voici ces dix commandements:
| « 1. Vous n'adorerez aucun autre dieu, car l'Éternel est un Dieu jaloux. | |
| « 2. Vous ne fondrez pas de statues des dieux. | |
| « 3. Vous ne négligerez pas d'observer la fête des pains sans levain. | |
| « 4. Tous les miles premiers-nés des hommes et du bétail sont à moi, dit l'Éternel. | |
| « 5. Vous travaillerez six jours, mais le septième jour vous vous reposerez. | |
| « 6. Vous ne manquerez pas d'observer la fête des premiers fruits et la fête des moissons à la fin de l'année. | |
| « 7. Vous n'offrirez le sang d'aucun sacrifice avec du pain levé. | |
| « 8. L'animal sacrifié pour la fête de la Pâque ne sera pas laissé sur place jusqu'au matin. | |
| « 9. Vous apporterez à la maison de l'Éternel votre Dieu les premiers des premiers fruits de la terre. | |
| « 10. Vous ne ferez pas bouillir un chevreau dans le lait de sa mère. |
« Ensuite, au milieu des tonnerres et des éclairs du Sinaï, Moïse leur donna les dix nouveaux commandements, et vous serez tous d'accord qu'ils sont des expressions plus dignes d'accompagner l'élargissement des concepts de la Déité de Jéhovah. N'avez-vous jamais remarqué le double enregistrement de ces commandements dans les Écritures? La première fois, la délivrance du joug égyptien est donnée comme raison pour observer le sabbat (1) mais, dans une rédaction ultérieure, les croyances religieuses évoluantes de nos ancêtres exigèrent que ce texte soit changé pour reconnaître le fait de la création comme motif d'observer le sabbat (2).
| (1) Deutéronome V-6. |
| (2) Exode XX-11. |
« Ensuite vous vous souviendrez qu'une fois de plus -- au temps spirituellement mieux éclairé d'Isaïe -- ces dix commandements négatifs furent changés en la grande loi positive d'amour, l'injonction d'aimer Dieu suprêmement et d'aimer son prochain comme soi-même. Moi aussi je proclame que cette loi suprême d'amour pour Dieu et pour les hommes constitue tout le devoir des hommes ».
Quand le Maître eut fini de parler, aucun des apôtres ne lui posa de questions. Ils allèrent chacun se reposer pour la nuit.
4. -- FLAVIUS ET LA CULTURE GRECQUE
Flavius, le Juif grec, était un prosélyte n'ayant pas accès au temple, car il n'avait été ni circoncis ni baptisé. Comme il appréciait beaucoup la beauté dans l'art et la sculpture, la maison qu'il occupait durant ses séjours à Jérusalem était un bâtiment magnifique. Elle était délicieusement ornée de trésors sans prix qu'il avait acquis çà et là au cours de ses voyages dans le monde. Quand il eut pour la première fois l'idée d'inviter Jésus, il craignit que le Maître ne s'offensât de voir ces « images ». Mais lorsque Jésus entra chez lui, Flavius fut agréablement surpris de voir qu'au lieu de le réprimander pour avoir ces objets soi-disant idolâtres ornant la maison, le Maître manifestait un grand intérêt pour toute la collection. Jésus posa maintes questions flatteuses sur chaque objet, tandis que Flavius l'accompagnait de pièce en pièce en lui montrant ses statues favorites.
Le Maître vit que son hôte était désorienté par son attitude favorable vis-à-vis des arts; en conséquence, quand ils eurent fini d'inspecter toute la collection, Jésus lui dit: « Parce que tu apprécies la beauté des choses créées par mon Père et façonnées par des mains d'artistes, pourquoi t'attendrais-tu à recevoir des reproches? Parce que Moïse a jadis cherché à combattre l'idolâtrie et l'adoration des faux dieux, pourquoi tous les hommes devraient-ils réprouver la reproduction de la grâce et de la beauté? Je te dis, Flavius, que les enfants de Moïse l'ont mal compris, et maintenant ils transforment en faux dieux sa prohibition des statues et des images des choses célestes et terrestres. Même si Moïse a enseigné ces restrictions à la pensée enténébrée de jadis, en quoi cela concerne-t-il notre temps où le Père céleste est révélé en tant que Souverain Spirituel universel? Flavius, je te déclare que dans le royaume à venir on n'enseignera plus n'adorez pas ceci et n'adorez pas cela; on ne s'occupera plus de commandements pour s'abstenir de ceci et pour prendre garde d'éviter cela, mais tout le monde s'occupera plutôt d'un devoir suprême. Ce devoir des hommes s'exprime en deux grands privilèges: l'adoration sincère du Créateur infini, le Père paradisiaque, et le service aimant rendu à nos semblables. Si tu aimes ton prochain comme toi-même, tu sais réellement que tu es un fils de Dieu.
« À une époque où mon Père n'était pas bien compris, Moïse avait raison d'essayer de résister à l'idolâtrie, mais dans l'âge à venir le Père aura été révélé dans la vie du Fils, et cette nouvelle révélation de Dieu rendra définitivement vain de confondre le Père Créateur avec des idoles de pierre ou des statues d'or et d'argent. Désormais les hommes intelligents peuvent jouir des trésors de l'art sans confondre cette appréciation matérielle de la beauté avec l'adoration et le service du Père céleste, le Dieu de toutes les choses et de tous les êtres».
Flavius crut tout ce que Jésus lui enseigna. Le lendemain il alla à Béthanie au delà du Jourdain se faire baptiser par les disciples de Jean. Il le fit parce que les apôtres de Jésus ne baptisaient pas encore les croyants. Lors de son retour à Jérusalem, Flavius donna un grand festin pour Jésus et invita soixante de ses amis. Et parmi ces invités, beaucoup se mirent aussi à croire au message du royaume à venir.
5. -- LE DISCOURS SUR L'ASSURANCE
L'un des grands sermons que Jésus prêcha dans le temple durant cette semaine de la Pâque fut une réponse à une question posée par un de ses auditeurs, un habitant de Damas. Cet homme demanda à Jésus: « Rabbi, comment saurons-nous avec certitude que tu es envoyé par Dieu et que nous pouvons vraiment entrer dans ce royaume dont toi et tes disciples vous proclamez qu'il est à portée de la main? » Et Jésus répondit:
Quant à mon message et à l'enseignement de mes disciples, vous devriez les juger à leurs fruits. Si nous vous proclamons les vérités de l'esprit, l'esprit témoignera dans votre coeur que notre message est authentique. Quant au royaume et à votre assurance d'être acceptés par le Père céleste, je vous demande s'il y aurait parmi vous un père, digne de ce nom et ayant du coeur, qui laisserait son fils dans l'anxiété ou dans le doute au sujet de son appartenance à sa famille ou de l'affection de son père? Vous autres pères terrestres, prenez-vous plaisir à torturer vos enfants en les laissant dans le doute sur la permanence de l'amour que vous leur portez dans votre coeur humain? Votre Père céleste ne laisse pas non plus ses enfants, nés d'esprit par la foi, dans l'incertitude sur leur position dans le royaume. Si vous recevez Dieu en tant que Père, alors en vérité vous êtes certainement les fils de Dieu. Et si vous êtes ses fils, alors vous êtes en sécurité dans la position et la situation de tout ce qui concerne la filiation divine et éternelle. Si vous croyez à mes paroles, vous croyez par là-même à Celui qui m'a envoyé, et en croyant ainsi au Père, vous avez rendu certain votre statut dans la citoyenneté céleste. Si vous faites la volonté du Père qui est aux cieux, vous ne manquerez jamais d'obtenir la vie éternelle de progrès dans le royaume divin.
« L'Esprit Suprême témoignera avec votre esprit que vous êtes vraiment les enfants de Dieu. Si vous êtes les fils de Dieu, alors vous êtes nés de l'esprit de Dieu, et quiconque est né de l'esprit a en lui-même le pouvoir de vaincre tous les doutes; c'est cela la victoire qui triomphe de toute incertitude, c'est votre foi elle-même.
« Le Prophète Isaïe a dit en parlant de cette époque: « Quand l'esprit sera répandu d'en haut sur nous, alors l'oeuvre de droiture sera la paix, la tranquillité, et l'assurance pour toujours ». Pour tous ceux qui croient sincèrement à ce royaume, je deviendrai une garantie de leur admission dans la miséricorde éternelle et la vie perpétuelle du royaume de mon Père. Vous donc qui entendez ce message et croyez à cet évangile du royaume, vous êtes les fils de Dieu et vous avez la vie perpétuelle. La preuve pour le monde entier que vous êtes nés d'esprit est que vous vous aimez sincèrement les uns les autres.
La foule des visiteurs resta de longues heures avec Jésus, lui posant des questions et écoutant attentivement ses réponses encourageantes. L'enseignement de Jésus enhardit même les apôtres à prêcher l'évangile du royaume avec plus de force et d'assurance. L'expérience à Jérusalem fut une grande inspiration pour les douze. C'était leur premier contact avec des foules aussi nombreuses, et ils apprirent bien des leçons profitables qui leur furent ultérieurement fort utiles pour leur apostolat.
6. -- LA VISITE DE NICODÈME
Un soir chez Flavius, un certain Nicodème vint voir Jésus; il était un membre riche et assez âgé du sanhédrin juif. Il avait beaucoup entendu parler des enseignements du Galiléen, si bien qu'il alla un jour l'écouter pendant qu'il enseignait dans la cour du temple. Il aurait voulu aller souvent écouter les leçons de Jésus, mais il craignait d'être vu parmi les auditeurs assistant à son enseignement. En effet, les dirigeants des Juifs s'écartaient déjà tellement du point de vue de Jésus que nul membre du sanhédrin n'aurait accepté d'être identifié ouvertement d'une manière quelconque avec lui. En conséquence, Nicodème avait pris des dispositions avec André pour voir Jésus en privé et précisément ce soir-là après la tombée de la nuit. Pierre, Jacques, et Jean se trouvaient dans le jardin de Flavius lorsque l'entretien commença, mais plus tard ils entrèrent tous dans la maison, où le discours se poursuivit.
En recevant Nicodème, Jésus ne fit pas montre d'une déférence spéciale. En parlant avec lui, il ne fit ni compromis ni tentative indue de persuasion. Le Maître n'essaya pas de repousser son interlocuteur recherchant le secret, et ne fut pas sarcastique. Dans tous ses rapports avec le distingué visiteur, Jésus fut calme, grave, et digne. Nicodème n'était pas délégué officiellement par le sanhédrin; il venait voir Jésus essentiellement à cause du sincère intérêt qu'il portait personnellement à l'enseignement du Maître.
Après avoir été présenté par Flavius, Nicodème dit: « Rabbi, nous savons que tu es un instructeur envoyé par Dieu, car nul homme ne pourrait enseigner de la sorte si Dieu n'était pas avec lui. Je désirerais en savoir plus long sur tes enseignements au sujet du royaume à venir ».
Jésus répondit à Nicodème: « En vérité, en vérité, je te dis, Nicodème, qu'à moins d'être né d'en haut un homme ne peut voir le royaume de Dieu ». Alors Nicodème répondit: « Mais comment un homme peut-il naître de nouveau quand il est vieux? Il ne peut entrer une seconde fois dans le sein de sa mère pour renaître ».
Jésus dit: « Néanmoins je te déclare qu'à moins de naître de l'esprit, un homme ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'esprit est esprit. Ne t'étonne pas que j'aie dit qu'il fallait naître d'en haut. Quand le vent souffle, tu entends le bruissement des feuilles, mais tu ne vois pas le vent -- ni d'où il vient ni où il va - et il en est ainsi pour quiconque est né de l'esprit. Avec les yeux de la chair on peut apercevoir les manifestations de l'esprit, mais on ne peut effectivement discerner l'esprit ».
Nicodème répondit: « Mais je ne comprends pas -- comment cela peut-il être? » Jésus dit: « Est-il possible que tu sois un éducateur d'Israël et que tu ignores tout cela? Ceux qui connaissent les réalités de l'esprit ont donc le devoir de révéler ces choses à ceux qui discernent seulement les manifestations du monde matériel. Nous croiras-tu si nous te parlons des vérités célestes? As-tu le courage, Nicodème, de croire en quelqu'un qui est descendu du ciel, au Fils de l'Homme lui-même? »
Nicodème dit alors: « Mais comment puis-je commencer à saisir cet esprit qui doit me recréer en me préparant à entrer dans le royaume? » Jésus répondit: « L'esprit du Père céleste demeure déjà en toi. Si tu désires être conduit par cet esprit d'en haut, tu commenceras très bientôt à voir avec les yeux de l'esprit; ensuite si tu choisis de tout coeur la gouverne de l'esprit, tu naîtras d'esprit, car le dessein unique de ta vie sera de faire la volonté de ton Père qui est aux cieux. En te trouvant ainsi né de l'esprit et heureux dans le royaume de Dieu, tu commenceras à produire dans ta vie quotidienne les abondants fruits de l'esprit ».
Nicodème était entièrement sincère. Il fut profondément impressionné, mais repartit désorienté. Il était un homme accompli quant au développement de soi, à la maîtrise de soi, et même quant aux hautes qualités morales. Il était raffiné, égocentrique, et altruiste, mais il ne savait pas comment soumettre sa volonté à celle du divin Père, comme un petit enfant accepte de se soumettre aux directives d'un père terrestre sage et aimant, et devenir ainsi en réalité un fils de Dieu, un héritier progressif du royaume éternel.
Mais Nicodème rassembla assez de foi pour prendre possession du royaume. Il protesta timidement lorsque ses collègues du sanhédrin cherchèrent à condamner Jésus sans l'entendre. Plus tard, avec Joseph d'Arimathie, il reconnut audacieusement sa foi et réclama le corps de Jésus, même au moment où la plupart des disciples avaient fui, terrorisés, la scène des souffrances et de la mort finale de leur Maître.
7. -- LA LEÇON SUR LA FAMILLE
Après la période active d'enseignement et de travail personnel de la semaine de la Pâque à Jérusalem, Jésus passa le mercredi suivant à se reposer à Béthanie avec ses apôtres. Cet après-midi-là, Thomas posa une question qui provoqua une longue et instructive réponse. Thomas dit: « Maître, le jour où nous avons été sélectionnés comme ambassadeurs du royaume, tu nous as dit beaucoup de choses et tu nous as donné des instructions sur notre mode personnel de vie, mais qu'allons-nous enseigner aux foules? Comment ces gens devront-ils vivre après la venue du royaume dans sa plénitude? Tes disciples posséderont-ils des esclaves? Tes fidèles rechercheront-ils la pauvreté et fuiront-ils la richesse? La miséricorde sera-telle seule à prévaloir, de sorte que nous n'aurons plus de lois ni de tribunaux? » Jésus et les douze passèrent tout l'après-midi et toute la soirée après le souper a discuter les questions de Thomas. Pour la clarté de notre exposé, nous présentons le résumé suivant des instructions du Maître:
Jésus chercha d'abord à faire comprendre à ses apôtres que lui-même vivait sur terre une vie unique d'incarnation, et qu'eux, les douze, avaient été appelés à participer à cette expérience d'effusion du Fils de l'Homme. En tant que collaborateurs, eux aussi devaient participer à bien des restrictions et obligations spéciales de l'expérience d'effusion. Il y eut une indication voilée que le Fils de l'Homme était la seule personne ayant jamais vécu sur terre qui pouvait simultanément voir dans le coeur même de Dieu et dans les profondeurs de l'âme humaine.
Jésus expliqua très clairement que le royaume des cieux est une expérience évolutionnaire, commençant ici sur terre et progressant par étapes successives de vie jusqu'au Paradis. Au cours de la soirée, il affirma nettement qu'à un certain stade futur de développement du royaume il reviendrait visiter ce monde avec puissance spirituelle et gloire divine.
Il expliqua ensuite que « l'idée du royaume » n'était pas la meilleure manière d'illustrer les relations de l'homme avec Dieu, mais qu'il employait cette métaphore parce que le peuple juif était dans l'attente du royaume et que Jean avait prêché en parlant du royaume à venir. Jésus dit: « Les gens d'une autre époque comprendront mieux l'évangile du royaume s'il est présenté en termes exprimant les relations de famille -- le jour où ils comprendront la religion comme l'enseignement de la paternité de Dieu, de la fraternité humaine, et de la filiation avec Dieu ». Ensuite le Maître discourut assez longuement sur la famille terrestre comme une illustration de la famille céleste et répéta les deux lois fondamentales de la vie: le premier commandement d'amour pour le père, pour le chef de famille, et le second commandement d'amour mutuel entre les enfants, tu aimeras ton frère comme toi-même. Il expliqua ensuite que cette qualité d'affection fraternelle se manifestait invariablement par un service social désintéressé et plein d'amour.
Vint ensuite l'analyse mémorable des caractéristiques fondamentales de la vie de famille et de leur application aux relations existant entre Dieu et l'homme. Jésus exposa qu'une vraie famille se fonde sur les sept faits suivants:
1. Le fait de l'existence. Les rapports naturels et les phénomènes de ressemblance physique sont liés dans la famille: les enfants héritent certains traits de leurs parents. Les enfants tirent leur origine de leurs parents; l'existence de leur individualité dépend de l'acte des parents. La relation de père à enfant est inhérente à toute la nature et imprègne toutes les existences vivantes.
2. Sécurité et plaisir. Les pères dignes de ce nom prennent grand plaisir à pourvoir aux besoins de leurs enfants. Beaucoup de pères ne se contentent pas de leur fournir simplement le nécessaire, mais aiment aussi à veiller à leurs plaisirs.
3. Instruction et éducation. Les pères avisés font soigneusement des plans pour instruire et éduquer convenablement leurs fils et leurs filles. Ils les préparent dès leur jeunesse aux responsabilités plus grandes de leur vie d'adulte.
4. Discipline et contrainte. Les pères prévoyants prennent aussi des dispositions pour la discipline, la gouverne, la réprimande, et parfois la contrainte nécessaires à leurs jeunes enfants dépourvus de maturité.
5. Camaraderie et loyauté. Un père affectueux entretient des rapports intimes et aimants avec ses enfants. Il prête toujours une oreille attentive à leurs demandes; il est toujours prêt à partager leurs épreuves et à les aider dans leurs difficultés. Le père porte un intérêt suprême aux étapes du bonheur de sa progéniture.
6. Amour et miséricorde. Un père compatissant pardonne généreusement. Les pères ne nourrissent pas d'idées de vengeance contre leurs enfants. Ils ne ressemblent ni à des juges, ni à des ennemis, ni à des créanciers. Les vraies familles sont fondées sur la tolérance, la patience, et le pardon.
7. Dispositions pour l'avenir. Les pères temporels aiment laisser un héritage à leurs fils. La famille continue d'une génération à la suivante. La mort ne met fin à une génération que pour marquer le début d'une autre. La mort termine une vie individuelle, mais non nécessairement la vie d'une famille.
Pendant des heures le Maître étudia l'application de ces caractéristiques de la vie de famille aux relations de l'homme (l'enfant terrestre) avec Dieu (le Père au Paradis) et voici sa conclusion: « Je connais à la perfection l'ensemble des relations d'un fils avec le Père, car j'ai déjà atteint maintenant, dans le domaine de la filiation, tout ce que vous devrez atteindre dans l'éternel futur. Le Fils de l'Homme est prêt pour son ascension à la droite du Père, de sorte qu'en moi le chemin est encore plus largement ouvert à chacun de vous pour voir Dieu et, avant que vous ayez achevé la glorieuse progression, pour devenir parfaits comme votre Père céleste est parfait ».
Lorsque les apôtres entendirent ces paroles saisissantes, ils se rappelèrent les déclarations que Jean avait faites à l'époque du baptême de Jésus; ils gardèrent aussi un souvenir très vif de cette expérience en liaison avec leurs prédications et leurs enseignements après la mort et la résurrection du Maître.
Jésus est un Fils divin à qui le Père Universel fait pleine confiance. Il a été avec le Père et l'a totalement compris. Il avait maintenant vécu sa vie terrestre à la pleine satisfaction du Père, et son incarnation dans la chair lui avait permis de comprendre pleinement les hommes. Jésus était la perfection de l'homme; il avait atteint la perfection que tous les croyants sincères sont destinés à atteindre en lui et par lui. Jésus révéla aux hommes un Dieu de perfection et se présenta lui-même à Dieu comme fils perfectionné des mondes.
Bien que Jésus eût discouru durant des heures, Thomas n'était pas encore satisfait, car il dit: « Maître, nous ne trouvons pas que le Père céleste nous traite toujours avec bonté et miséricorde. Bien des fois nous souffrons amèrement sur terre, et nos prières ne sont pas toujours exaucées. Sur quels points manquons-nous de saisir le sens de ton enseignement? »
Jésus répondit: « Thomas, Thomas, combien de temps faudra-t-il pour que tu acquières l'aptitude à écouter avec l'oreille de l'esprit? Combien s'écoulera-t-il d'années avant que tu discernes que notre royaume est un royaume de l'esprit et que notre Père est aussi un être spirituel? Ne comprends-tu pas que je vous enseigne en tant qu'enfants de l'esprit dans la famille spirituelle des cieux, dont le chef paternel est un esprit infini et éternel? Ne me laisseras-tu pas dépeindre la famille terrestre comme une homologie des relations divines, sans appliquer littéralement mon enseignement aux affaires matérielles? Ne pouvez-vous séparer mentalement les réalités spirituelles du royaume d'avec les problèmes matériels, sociaux, économiques, et politiques de notre temps? Quand je parle le langage de l'esprit, pourquoi persistez-vous à traduire ma pensée dans le langage de la chair, simplement parce que je me permets d'employer des comparaisons avec le monde physique de la vie courante? Mes enfants, je vous supplie de cesser d'appliquer l'enseignement du royaume de l'esprit aux sordides affaires d'esclavage, de misère, de maisons, et de terres et aux problèmes matériels d'équité et de justice humaines. Ces questions temporelles concernent les hommes de ce monde, et bien que d'une certaine manière elles affectent tous les hommes, vous avez été appelés à me représenter dans le monde comme je représente mon Père. Vous êtes les ambassadeurs spirituels d'un royaume d'esprit, les représentants spéciaux du Père spirituel. Il devrait déjà m'être possible de vous instruire comme des adultes du royaume de l'esprit. Faudra-t-il toujours que je vous parle comme à des enfants? Ne croîtrez-vous jamais en perception spirituelle? Néanmoins je vous aime et vous supporterai jusqu'au bout de notre association dans la chair. Et même après cela, mon esprit vous précédera dans le monde entier ».
8. -- EN JUDÉE MÉRIDIONALE
Vers la fin d'avril, l'opposition contre Jésus était devenue si prononcée chez les pharisiens et les sadducéens que le Maître et ses apôtres décidèrent de quitter Jérusalem pour un temps et d'aller vers le sud enseigner à Bethléhem et à Hébron. Tout le mois de mai fut employé à faire de l'apostolat personnel dans ces villes et chez les habitants des villages environnants. Au cours de ce déplacement, les apôtres ne firent aucune prédication en public, mais seulement des visites de maison en maison. Pendant qu'ils enseignaient l'évangile et soignaient les malades, Jésus et Abner passèrent une partie du mois à Engaddi à visiter la colonie naziréenne. Jean le Baptiste avait quitté les lieux, et Abner était devenu chef de ce groupe. Beaucoup de membres de la confrérie naziréenne se mirent à croire en Jésus, mais la majorité de ces hommes ascétiques et originaux refusa de l'accepter comme un instructeur envoyé du ciel, parce qu'il n'enseignait ni le jeûne ni d'autres formes de renoncement.
Les habitants de cette région ne savaient pas que Jésus était né à Bethléhem. Comme la majorité des disciples, ils supposaient toujours que le Maître était venu au monde à Nazareth, mais les douze apôtres connaissaient le fait.
Ce séjour en Judée méridionale fut une période de travail utile et reposant; le royaume s'accrut de nombreux adeptes. Au début de juin, l'agitation contre Jésus s'était si bien calmée à Jérusalem que le Maître et les apôtres y retournèrent pour instruire et encourager les croyants.
Bien que Jésus et les apôtres eussent passé tout le mois de juin à Jérusalem où aux environs, ils ne prêchèrent pas publiquement durant cette période. Ils vécurent la plupart du temps sous des tentes qu'ils plantaient dans un parc ou jardin ombragé nommé Gethsémani, situé sur la pente ouest du Mont des Oliviers, non loin des gorges du Cédron. Ils passaient généralement les sabbats de fin de semaine chez Lazare et ses soeurs à Béthanie. Jésus ne pénétra que rarement à l'intérieur des murs de Jérusalem, mais un grand nombre d'investigateurs allèrent jusqu'à Gethsémani pour le voir. Un vendredi soir, Nicodème et un certain Joseph d'Arimathie s'aventurèrent à rendre visite à Jésus mais, après être arrivés devant l'entrée de la tente du Maître, ils rebroussèrent chemin par peur. Bien entendu, ils ne se doutaient pas que Jésus avait connaissance de tous leurs déplacements.
Quand les dirigeants des Juifs apprirent que Jésus était revenu à Jérusalem, ils se préparèrent à l'arrêter; mais remarquant qu'il ne faisait pas de sermons publics, ils conclurent qu'il avait été effrayé par leurs menaces antérieures et décidèrent de le laisser poursuivre son enseignement de cette manière privée, sans le molester davantage. Les affaires suivirent donc tranquillement leur cours jusqu'aux derniers jours de juin lorsqu'un certain Simon, membre du sanhédrin, se rallia publiquement aux enseignements de Jésus après l'avoir annoncé au préalable aux chefs des Juifs. Immédiatement une nouvelle agitation s'éleva pour appréhender Jésus, et elle devint si forte que le Maître décida de se retirer dans les villes de la Samarie et de la Décapole.
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- Category: 4. LA VIE ET LES ENSEIGNEMENTS DE JÉSUS
LE COMMENCEMENT DE L'OEUVRE PUBLIQUE
LE 19 janvier de l'an 27, premier jour de la semaine, Jésus et les douze apôtres se préparèrent à quitter leur quartier général de Bethsaïde. Les douze ne savaient rien des plans de leur Maître, sinon qu'ils iraient a Jérusalem pour assister à la fête de la Pâque d'avril, et que l'itinéraire projeté passait par la vallée du Jourdain. Ils ne partirent guère avant midi de la maison de Zébédée, parce les familles des apôtres et d'autres disciples étaient venues leur dire adieu et leur souhaiter bonne chance dans la nouvelle tâche qu'ils étaient sur le point d'entreprendre.
Au moment du départ, les apôtres ne virent pas le Maître, et André partit à sa recherche. Il ne tarda pas à le trouver assis dans un bateau sur la plage, et Jésus pleurait. Les douze avaient souvent vu leur Maître à des moments où il semblait triste et ils avaient été témoins de ses brèves périodes de graves préoccupations mentales, mais aucun ne l'avait jamais vu verser des larmes. André fut quelque peu stupéfait de voir le Maître ainsi affecté le jour de leur départ pour Jérusalem. Il osa s'approcher de Jésus et lui demanda: « En ce grand jour, Maître, au moment où nous allons nous rendre à Jérusalem pour proclamer le royaume du Père, comment se fait-il que tu pleures? Qui de nous t'a offensé? } Et Jésus, revenant avec André vers les douze, lui répondit: « Aucun de vous ne m'a causé de chagrin. Je suis attristé seulement parce qu'aucun membre de la famille de mon père Joseph n'a songé à venir nous souhaiter bon voyage ».
A ce moment-là Ruth était en visite chez son frère Joseph à Nazareth; les autres membres de la famille s'étaient tenus à l'écart par orgueil, déception, incompréhension, et mesquine rancune éprouvée parce que leurs sentiments avaient été froissés.
1. -- DÉPART DE GALILÉE
Capharnaüm n'était pas loin de Tibériade; la renommée de Jésus avait commencé à se répandre dans toute la Galilée, et même au delà. Jésus savait qu'Hérode ne tarderait pas à prêter attention à son oeuvre; il estima donc qu'il valait mieux se diriger vers le sud et entrer en Judée avec ses apôtres. Une compagnie de plus de cent croyants désirait faire route avec eux, mais Jésus leur parla et les pria de ne pas accompagner le groupe apostolique sur le chemin descendant le Jourdain. Ils consentirent à rester en arrière, mais au bout de quelques jours, nombre d'entre eux suivirent le Maître.
Le premier jour, Jésus et les apôtres n'allèrent pas plus loin que Tarichée, où ils se reposèrent pour la nuit. Le lendemain, ils voyagèrent jusqu'à un point du Jourdain proche de Pella, où Jean avait prêché environ un an auparavant, et où Jésus avait reçu le baptême. Ils s'arrêtèrent là durant plus de deux semaines, enseignant et prêchant. A la fin de la première semaine, plusieurs centaines de personnes s'étaient rassemblées dans un camp proche de l'endroit où demeuraient Jésus et les douze; cette foule était venue de Galilée, de Phénicie, de Syrie, de la Décapole. de Pérée, et de Judée.
Jésus ne prêcha pas en public. André divisa la foule et désigna des prédicateurs pour les réunions du matin et de l'après-midi. Après le repas du soir, Jésus s'entretenait avec les douze. Il ne leur enseignait rien de nouveau, mais passait en revue son enseignement antérieur et répondait à leurs nombreuses questions. Au cours de l'une de ces soirées, il donna aux douze quelques indications sur les quarante jours qu'il avait passés dans la montagne à proximité de ce lieu.
Bien des auditeurs venus de Pérée et de Judée avaient été baptisés par Jean et voulaient en apprendre davantage sur les enseignements de Jésus. Les apôtres firent beaucoup de progrès en instruisant les disciples de Jean, en ce sens qu'ils ne déprécièrent en aucune manière les prédications de Jean, et qu'à cette époque ils ne baptisèrent même pas leurs nouveaux disciples. Mais ce fut toujours une pierre d'achoppement pour les partisans de Jean de voir que Jésus, s'il était vraiment ce que Jean avait annoncé, ne faisait rien pour le tirer de prison. Les disciples de Jean ne purent jamais comprendre pourquoi Jésus n'empêcha pas la mort cruelle de leur chef bien-aimé.
Soirée après soirée, André enseigna à ses compagnons apôtres la tâche délicate et difficile de bien s'entendre avec les disciples de Jean le Baptiste. Durant cette première année du ministère public de Jésus, plus des trois quarts de ses disciples avaient antérieurement suivi Jean et reçu son baptême. Toute cette année 27 se passa à prendre tranquillement la suite de l'oeuvre de Jean en Pérée et en Judée.
2. -- LA LOI DE DIEU ET LA VOLONTÉ, DU PÈRE
Le soir avant leur départ de Pella, Jésus donna aux apôtres quelques enseignements supplémentaires sur le nouveau royaume. Le Maître dit: « On vous a appris à envisager la venue du royaume de Dieu, et maintenant je viens vous annoncer que ce royaume longtemps attendu est à portée de la main, qu'il est même déjà là, au milieu de nous. Tout royaume comporte un roi siégeant sur son trône et décrétant les lois du royaume. Vous avez donc conçu le royaume des cieux comme une souveraineté glorifiée du peuple juif sur tous les peuples de la terre, avec le Messie siégeant sur le trône de David et, de ce lieu de pouvoir miraculeux, promulguant les lois du monde entier. Mais, mes enfants, vous ne voyez pas avec l'oeil de la foi et vous n'entendez pas avec l'intelligence de l'esprit. J'affirme que le royaume du ciel est la compréhension claire et la récognition de la loi de Dieu dans le coeur des hommes. Il est vrai qu'il y a un Roi dans ce royaume; ce Roi est mon Père et votre Père. Nous sommes en vérité ses sujets loyaux, mais la vérité transformatrice que nous sommes ses fils transcende de loin notre sujétion. Dans ma vie, cette vérité doit devenir manifeste pour tous. Notre Père siège aussi sur un trône, mais sur un trône non fait de main d'homme. Le trône de l'Infini est sa résidence éternelle dans le ciel des cieux; le Père remplit toute la création et proclame ses lois à des myriades d'univers. Il règne aussi dans le coeur de ses enfants terrestres par l'esprit qu'il a envoyé vivre dans l'âme des mortel ».
« Si vous êtes les sujets de ce royaume, il vous devient en vérité possible d'entendre la loi du Souverain de l'Univers. Mais si, à cause de l'évangile que je suis venu proclamer, vous découvrez par la foi que vous êtes des fils, vous ne vous considérerez plus comme des créatures soumises à la loi d'un roi tout-puissant, mais comme des fils privilégiés d'un Père divin et aimant. En vérité, en vérité, je vous le dis, si la volonté du Père est votre loi, vous n'êtes pas dans le royaume. Mais si la volonté Père devient vraiment votre volonté, alors vous êtes indiscutablement dans le royaume, parce que le royaume est devenu de ce fait une expérience établie en vous. Quand la volonté de Dieu est votre loi, vous êtes de nobles sujets esclaves; mais si vous croyez à ce nouvel évangile de filiation divine, la volonté de mon Père devient la votre, et vous êtes élevés à la haute position de libres enfants de Dieu, de fils affranchis dans le royaume.
Certains apôtres saisissaient quelque peu cet enseignement, mais aucun d'eux ne comprenait la pleine signification de cette prodigieuse annonce, sauf peut-être Jean Zébédée. Toutefois, ces paroles s'enfonçaient dans leur coeur et ils se les rappelèrent avec joie durant leurs années ultérieures d'apostolat.
3. -- LE SÉJOUR À AMATH
Le Maître et ses apôtres restèrent aux environs d'Amath pendant près de trois semaines. Les apôtres continuèrent à prêcher deux fois par jour devant la foule, et Jésus prêcha tous les après-midis de sabbat. Il devint impossible de poursuivre les récréations du mercredi; alors André décida que deux apôtres se reposeraient chacun des six jours de la semaine par roulement, et que tous seraient de service durant le jour du sabbat.
Pierre, Jacques, et Jean firent la plupart des sermons publics. Philippe, Nathanael, Thomas, et Simon exécutèrent une grande partie du travail personnel et dirigèrent des classes pour des groupes spéciaux d'investigateurs. Les jumeaux continuèrent leur supervision générale de la police, tandis qu'André, Matthieu, et Judas s'organisèrent en un comité d'administration générale de trois membres, mais chacun des trois effectuait aussi un travail religieux considérable.
André était fort occupé à régler les malentendus et les désaccords perpétuellement renouvelés entre les disciples de Jean et les plus récents disciples de Jésus. Des crises sérieuses éclataient constamment, mais André, avec l'aide de ses collègues apostoliques, s'arrangeait pour amener les parties en conflit et conclure un accord quelconque, au moins temporairement. Jésus refusa de participer à aucune de ces conférences; il ne voulut pas non plus donner le moindre conseil pour le règlement approprié des différends. Pas une seule fois il n'offrit de suggestion sur la manière dont les apôtres devraient résoudre ces problèmes embarrassants. Quand André abordait ces questions, Jésus disait toujours: « Il est malavisé pour l'hôte de participer aux querelles de famille de ses invités; un parent sage ne prend jamais parti dans les mesquines querelles de ses propres enfants ».
Le Maître déployait une grande sagesse et manifestait une parfaite équité dans tous ses rapports avec ses apôtres, ainsi qu'avec tous ses disciples. Jésus était vraiment un conducteur d'hommes. Il exerçait une grande influence sur ses semblables à cause de la combinaison de charme et de force de sa personnalité. De sa rude vie de nomade sans foyer, il se dégageait une subtile influence de commandement. Il y avait une attirance intellectuelle et un pouvoir d'attraction spirituelle dans sa manière d'enseigner pleine d'autorité, dans sa logique lucide, dans sa force de raisonnement, dans sa clairvoyance sagace, dans sa pensée alerte, dans son équilibre incomparable, et dans sa sublime tolérance. Jésus était simple, viril, honnête, et intrépide. Accompagnant toute l'influence physique et intellectuelle manifestée dans sa présence, il y avait aussi tous les charmes spirituels désormais attachés à sa personnalité -- la patience, la tendresse, la mansuétude, la douceur, et l'humilité.
Jésus de Nazareth était vraiment une personnalité vigoureuse et énergique; il était une puissance intellectuelle et une forteresse spirituelle. Non seulement sa personnalité attirait parmi ses disciples des femmes enclines a la spiritualité, mais aussi des hommes instruits et intellectuels comme Nicodème et le hardi soldat romain, le capitaine de garde auprès de la croix qui, après avoir assisté aux derniers moments du Maître, dit: « En vérité, c'était un Fils de Dieu ». Et les robustes et rudes pêcheurs Galiléens l'appelaient Maître.
Les portraits de Jésus ont été fort malencontreux. Ces tableaux peints du Christ ont exercé une influence délétère sur la jeunesse. Les marchands du temple n'auraient guère fui devant Jésus s'il avait été un homme tel que vos artistes le dépeignent généralement. Il avait une nature humaine dignifiée; il était bon, mais naturel. Jésus ne posait pas au mystique doux, agréable, gentil, et aimable. Son enseignement avait un dynamisme galvanisant. Non seulement la bonté animait ses intentions, mais il parcourait le pays en faisant efficacement du bien.
Le Maître n'a jamais dit: « Venez à moi, vous tous qui êtes indolents et rêveurs ». Mais il a dit à maintes reprises: « Venez à moi, vous tous qui peinez, et je vous donnerai du repos -- de la force spirituelle ». En vérité, le joug du Maître est léger, mais même ainsi, il ne l'impose jamais; chaque individu doit prendre ce joug de son propre gué.
Jésus décrivit la conquête par sacrifice, le sacrifice de l'orgueil et de l'égoïsme. En montrant de la miséricorde, il voulait dépeindre la manière spirituelle de se libérer de toutes les rancunes, des griefs, de la colère, et de la soif de vengeance et de pouvoir personnel. Lorsqu'il dit: « Ne résistez pas au mal », il expliqua plus tard qu'il n'entendait pas approuver le péché ni conseiller de fraterniser avec l'iniquité. Il avait davantage l'intention d'enseigner à pardonner, à « ne pas résister aux mauvais traitements infligés à votre personnalité, aux cruelles blessures infligées à vos sentiments de dignité personnelle ».
4. -- ENSEIGNEMENT AU SUJET DU PÈRE
Durant son séjour à Amath, Jésus passa beaucoup de temps à enseigner aux apôtres le nouveau concept de Dieu. Maintes et maintes fois il leur inculqua que Dieu est un Père, et non un grand et suprême teneur de livres, principalement occupé à inscrire au compte débiteur de ses enfants terrestres égarés, avec un préjugé défavorable, leurs péchés et leurs mauvaises actions pour les utiliser ultérieurement contre eux quand il les jugera en tant que juste Juge de toute la création. Les Juifs avaient depuis longtemps conçu Dieu comme un souverain universel, et même comme un Père de la nation, mais jamais auparavant une multitude humaine n'avait conçu Dieu en tant que Père de chaque individu.
En réponse à la question de Thomas « Qui est ce Dieu du royaume? » Jésus répliqua: « Dieu est ton Père, et la religion -- mon évangile -- n'est rien de plus ou de moins que de reconnaître, en y croyant, la vérité que tu es son fils. Je suis incarne ici parmi vous pour clarifier ces deux idées par ma vie et mes enseignements ».
Jésus chercha aussi à libérer la pensée de ses apôtres de l'idée que les sacrifices d'animaux étaient un devoir religieux. Mais ces hommes élevés dans la religion du sacrifice quotidien étaient lents à comprendre ce qu'il voulait dire. Néanmoins le Maître ne se lassa pas d'enseigner. Quand il ne réussissait pas à atteindre la pensée de tous les apôtres par un seul exemple, il répétait son message en employant une autre parabole pour les éclairer.
En même temps, Jésus commença à instruire plus complètement les douze sur leur mission « de consoler les affligés et de soigner les malades » Le Maître leur parla longuement de l'homme total -- de l'union d'un corps, d'une pensée, et d'un esprit pour former un homme ou une femme. Jésus exposa a ses apôtres les trois formes d'affliction qu'ils allaient rencontrer, et poursuivit en leur expliquant comment ils devraient apporter leur ministère à tous ceux qui souffrent des inconvénients des maladies humaines. Il leur apprit à reconnaître:
| 1. Les maux de la chair -- les afflictions communément considérées comme des maladies physiques. |
| 2. Les pensées désaxées -- les afflictions non physiques, ultérieurement considérées comme les troubles et des dérangements émotionnels et mentaux. |
| 3. La possession par de mauvais esprits. |
En plusieurs occasions, Jésus expliqua à ses apôtres la nature des mauvais esprits et leur donna quelques indications sur leur origines; à cette époque, on les appelait souvent esprits impurs. Le Maître connaissait bien la différence entre la possession par de mauvais esprits et la démence, mais les autres l'ignoraient. Vu leur connaissance limitée de l'histoire primitive d'Urantia, Jésus ne pouvait pas non plus entreprendre de leur rendre cette question pleinement compréhensible. Mais il leur dit à maintes reprises en faisant allusion aux mauvais esprits: « Ils ne molesteront plus les hommes quand je serai monté au ciel auprès de mon Père et que j'aurai répandu mon esprit sur toute chair à l'époque ou le royaume viendra en grande puissance et en gloire spirituelle ».
De semaine en semaine et de mois en mois durant toute cette année, les apôtres tournèrent de plus en plus leur attention vers la guérison des malades.
5. -- UNITÉ SPIRITUELLE
L'une des conférences du soir les plus mouvementées d'Amath fut la session où l'on discuta de l'unité spirituelle. Jacques Zébédée avait demandé: « Maître, comment apprendrons nous à avoir le même point de vue et à jouir ainsi d'une plus grande harmonie entre nous? » Lorsque Jésus entendit cette question, son esprit fut tellement ému qu'il répliqua: « Jacques, Jacques, quand t'ai-je enseigné que vous deviez avoir le même point de vue? Je suis venu dans le monde pour proclamer la liberté spirituelle afin que les mortels aient le pouvoir de vivre des vies individuelles originales et libres devant Dieu ». Je ne désire pas que l'harmonie sociale et la paix fraternelle soient achetées par le sacrifice de la libre personnalité et de l'originalité spirituelle. Ce que je vous demande, mes apôtres, c'est l'unité spirituelle -- et vous pouvez la ressentir dans la joie de votre consécration unie à faire de tout coeur la volonté de notre Père céleste. Vous n'avez pas besoin d'avoir le même point de vue, les mêmes sentiments, ni même des pensées semblables, pour être spirituellement semblables. L'unité spirituelle dérive de la conscience que chacun de vous est habité, et de plus en plus dominé, par le don d'esprit du Père céleste. Votre harmonie apostolique doit naître du fait que l'espoir spirituel de chacun de vous est identique par son origine, sa nature, et sa destinée.
« De cette manière, vous pouvez atteindre dans vos desseins et votre compréhension une parfaite unité spirituelle provenant de la conscience mutuelle de l'identité de chacun des esprits du Paradis qui vous habitent; et vous pourrez jouir de cette profonde unité spirituelle même devant la plus extrême diversité de vos comportements individuels dans les domaines de la réflexion intellectuelle, des sentiments innés, et de la conduite sociale. Vos personnalités peuvent avoir une diversité reposante et des différences marquées, en même temps que vos natures spirituelles et les fruits spirituels de votre adoration divine et de votre amour fraternel peuvent être bien unifiés; alors tous ceux qui observent votre vie prendront certainement acte de cette identité spirituelle et de cette unité d'âme. Ils reconnaîtront que vous avez vécu auprès de moi et que vous avez ainsi appris à faire d'une manière acceptable la volonté du Père qui est aux cieux. Vous pouvez atteindre l'unité dans le service de Dieu, même pendant que vous accomplissez ce service selon la technique de vos propres dons originaux de corps, de pensée, et d'âme.
« Votre unité spirituelle implique deux facteurs qui s'harmonisent toujours dans la vie individuelle des croyants: premièrement vous possédez un motif commun pour la vie d'apostolat; chacun de vous désire par-dessus tout faire la volonté du Père céleste. Et deuxièmement vous avez tous un but commun d'existence; vous avez tous le dessein de trouver le Père céleste, et de prouver par là à l'univers que vous commencez à ressembler à Dieu ».
Jésus revint bien des fois sur ce thème durant l'éducation des douze. A maintes reprises il leur répéta qu'il ne désirait pas voir ceux qui croyaient en lui devenir dogmatiques et uniformisés conformément aux interprétations religieuses des gens de bien. Il ne cessa de mettre ses apôtres en garde contre l'élaboration de credos et l'établissement de traditions comme moyen de guider et de contrôler les croyants dans l'évangile du royaume.
6. -- LA DERNIÈRE SEMAINE À AMATH
Vers la fin de la dernière semaine à Amath, Simon le Zélote amena à Jésus un certain Téherma, un Persan qui faisait des affaires à Damas. Ayant entendu parler de Jésus, Téherma était venu à Capharnaüm pour le voir. Apprenant que jésus était parti avec les apôtres pour Jérusalem en descendant le Jourdain, il partit à sa recherche. André avait présenté Téherma à Simon afin qu'il l'instruise. Simon considérait le Persan comme un « adorateur du feu », bien que Téherma ait pris grand soin de lui expliquer que le feu n'était que le symbole visible de l'Être Pur et Saint. Après un entretien avec Jésus, le Persan signifia son intention de rester plusieurs jours à écouter l'enseignement et les prédications.
Quand Simon le Zélote et Jésus furent seuls, Simon demanda au Maître: «Comment se fait-il que je n'aie pas réussi à le persuader? Pourquoi m'a-t-il tant résisté et t'écoute-t-il si volontiers? » Jésus répondit: « Simon, Simon, combien de fois t'ai-je recommandé de t'abstenir de tout effort pour faire jaillir quelque chose du coeur de ceux qui cherchent le salut? Combien souvent je t'ai dit de ne travailler que pour faire pénétrer quelque chose dans ces âmes assoiffées. Conduis les hommes dans le royaume, et ensuite les grandes vérités vivantes du royaume ne tarderont pas à éliminer toute erreur sérieuse. Une fois que tu as annoncé à un mortel la bonne nouvelle que Dieu est son Père, tu peux d'autant plus facilement le persuader qu'il est réellement un fils de Dieu. Après avoir fait cela, tu as apporté la lumière du salut à un être plongé dans les ténèbres. Simon, la première fois que le Fils de l'Homme est venu vers toi, a-t-il condamné Moïse et les prophètes pour proclamer une nouvelle et meilleure manière de vivre? Non. Je ne suis pas venu pour enlever ce que vous tenez de vos ancêtres, mais pour vous montrer une vision plus parfaite de ce que vos pères n'ont vu qu'en partie. Donc, Simon, va enseigner et prêcher le royaume, et quand tu y auras conduit un homme sain et sauf, alors il sera temps, s'il vient vers toi avec des questions, de lui communiquer un enseignement relatif à l'avancement progressif de l'âme à l'intérieur du royaume divin ».
Simon fut étonné par ces paroles, mais fit ce que Jésus lui avait recommandé, et Téherma le Persan compta au nombre des participants au royaume.
Ce soir-là, Jésus fit aux apôtres un discours sur la nouvelle vie dans le royaume. Il dit notamment: « Lorsque vous entrez dans le royaume, vous êtes nés de nouveau. Vous ne pouvez enseigner les choses profondes de l'esprit à ceux qui sont seulement nés de la chair. Veillez d'abord à ce que les hommes soient nés de l'esprit avant de chercher à les instruire des voies avancées de la spiritualité. N'entreprenez pas de leur montrer les beautés du temple avant de les avoir d'abord fait entrer dans le temple. Présentez les hommes à Dieu en tant que fils de Dieu avant de discourir sur les doctrines de la paternité de Dieu et de la filiation des hommes. Ne luttez pas avec les hommes -- soyez toujours patients. Le ciel n'est pas votre royaume, vous n'en êtes que les ambassadeurs. Contentez-vous d'aller proclamer: Voici le royaume des cieux -- Dieu est votre Père et vous êtes ses fils, et si vous croyez de tout coeur à cette bonne nouvelle, elle est votre salut éternel ».
Les apôtres firent de grands progrès durant leur séjour à Amath, mais ils furent très déçus que Jésus n'ait voulu leur faire aucune suggestion au sujet des rapports avec les disciples de Jean. Même sur l'importante question du baptême, Jésus se borna à dire: « En vérité Jean a baptisé d'eau, mais quand vous entrerez dans le royaume des cieux, vous serez baptisés d'esprit ».
7. -- À BÉTHANIE AU DELÀ DU JOURDAIN
Le 26 février, Jésus, ses apôtres, et un groupe nombreux de disciples suivirent le Jourdain en descendant jusqu'au gué proche de Béthanie en Pérée, à l'endroit où Jean avait fait sa première proclamation du royaume a venir. Jésus resta là quatre semaines avec ses apôtres avant de repartir pour se rendre à Jérusalem.
Durant la seconde semaine du séjour à Béthanie au delà du Jourdain, Jésus emmena Pierre, Jacques, et Jean se reposer trois jours dans les montagnes situées de l'autre côté du fleuve, au sud de Jéricho. Le Maître enseigna à ces trois hommes de nouvelles vérités supérieures sur le royaume des cieux. Nous les avons remises en ordre et classées de la manière suivante pour la clarté de notre exposé:
Jésus s'efforça d'expliquer ce qu'il désirait de ses disciples ayant ressenti le bon esprit des réalités du royaume. Il voulait les voir vivre dans le monde de telle sorte que les hommes, en voyant leur vie, deviennent conscients du royaume et soient ainsi amenés à s'enquérir auprès des croyants sur les voies du royaume. Les sincères chercheurs de vérité sont toujours heureux d'entendre la bonne nouvelle du don de la foi, qui assure l'admission dans le royaume avec ses réalités spirituelles éternelles et divines.
Le Maître cherchait à inculquer à tous ceux qui enseignaient l'évangile du royaume que leur seule affaire consistait à révéler individuellement aux hommes que Dieu est leur Père -- à rendre ces hommes personnellement conscients de leur filiation, et ensuite à les présenter à Dieu comme ses fils par la foi. Ces deux révélations essentielles étaient accomplies en Jésus. Il devint réellement « le chemin, la vérité, et la vie ». La religion de Jésus était entièrement fondée sur la manière de vivre sa vie d'effusion sur terre. Lorsque Jésus quitta ce monde, il ne laissa derrière lui ni livres, ni lois, ni autres formes d'organisation humaine affectant la vie religieuse des individus.
Jésus expliqua clairement qu'il était venu pour établir avec les hommes des relations personnelles et éternelles qui auraient définitivement préséance sur toutes les autres relations humaines. Il fit ressortir que cette communion spirituelle intime devait être étendue à tous les hommes de tous les âges et de toutes les conditions sociales chez tous les peuples. La seule récompense qu'il faisait miroiter à es enfants était: dans ce monde la joie spirituelle et la communion divine et dans l'autre monde la vie éternelle avec l'assimilation progressive des divines réalités spirituelleS du Père du Paradis.
Jésus insista beaucoup sur ce qu'il appelait les deux vérités de première importance dans les enseignements du royaume, à savoir: l'obtention du salut par la foi et la foi seule, associée à l'enseignement révolutionnaire de l'obtention de la liberté humaine par la récognition de la vérité. « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous affranchira ». Jésus était la vérité manifestée dans la chair, et il promit d'envoyer son Esprit de Vérité dans le coeur de tous ses enfants après son retour auprès de son Père céleste.
Le Maître enseignait aux apôtres les éléments essentiels de la vérité pour tout un âge terrestre. Les enseignements qu'ils écoutaient étaient souvent destinés en réalité à inspirer et à édifier d'autres planètes. Il donna l'exemple d'un plan de vie nouveau et original. Du point de vue humain, il était véritablement un Juif, mais il vécut sa vie comme un mortel du royaume pour l'édification du monde entier.
Pour être sur que son Père serait reconnu au cours du développement du plan du royaume, Jésus expliqua qu'il avait volontairement ignoré « les grands de la terre ». Il commença son travail avec les pauvres, la classe même qui avait été si négligée par les religions évolutionnaires des époques précédentes. Il ne méprisait personne; son plan était à l'échelle de la planète, et même de l'univers. Jésus montrait tant d'audace et d'énergie dans ces annonces que même Pierre, Jacques, et Jean furent tentés de croire qu'il ne se possédait plus.
Il chercha doucement à faire comprendre à ses apôtres qu'il accomplissait cette mission d'effusion non pour donner un exemple à quelques créatures d'Urantia, mais pour établir et montrer un critère de vie humaine pouvant servir à tous les peuples de toutes les planètes de tout son univers. Ce modèle de vie approchait de la plus haute perfection, et même de la bonté suprême du Père Universel, mais les apôtres ne pouvaient saisir la signification des paroles du Maître.
Il annonça qu'il était venu opérer comme instructeur, un instructeur envoyé du ciel pour présenter la vérité spirituelle à la pensée matérielle. Or c'est exactement ce qu'il fit; il était un instructeur et non un prédicateur. Du point de vue humain, Pierre était un prédicateur beaucoup plus efficace que Jésus. Les sermons de Jésus avaient une grande portée, due à sa personnalité extraordinaire bien plus qu'à un irrésistible attrait oratoire ou émotionnel. Jésus parlait directement aux âmes. Il instruisait l'esprit par l'intermédiaire de la pensée. Il vivait avec les hommes.
Ce fut à cette occasion que Jésus signifia à Pierre, Jacques, et Jean que son oeuvre sur terre devait, sous certains rapports, être limitée conformément au mandat reçu de son « associé céleste ». Il faisait allusion aux instructions données avant son effusion par son frère paradisiaque Emmanuel. Il leur dit qu'il était venu faire la volonté de son Père, et uniquement la volonté de son Père. En raison de ce dessein unique qui était son mobile sincère, il ne se tourmentait pas de l'emprise du mal dans le monde.
Les apôtres commençaient à reconnaître l'inaltérable amitié de Jésus. Bien que le Maître fût d'un abord facile, il vivait toujours indépendamment de tous les êtres humains et au-dessus d'eux. Jamais il ne fut dominé, même un instant, par une influence purement terrestre, ni sujet à la fragilité du jugement humain. Il né prêtait aucune attention à l'opinion publique, et les louanges le laissaient indifférent. Il s'interrompait rarement pour corriger des malentendus ou pour s'offenser d'une présentation erronée des faits. Il ne demanda jamais conseil à personne; il ne réclama jamais de prières.
Jacques s'étonnait de la manière dont Jésus prévoyait la fin dès le commencement. Le Maître paraissait rarement surpris. Il n'était jamais agité, vexé, ou déconcerté. Il ne présenta jamais d'excuses à personne. Il était parfois attristé, mais jamais découragé.
Jean comprit plus clairement que, malgré tous ses dons divins, Jésus était après tout un homme. Il vivait humainement parmi les hommes, il les comprenait, les aimait, et savait les diriger. Dans sa vie personnelle, il était extrêmement humain et parfaitement irréprochable. Et il était toujours désintéressé.
Bien que Pierre, Jacques, et Jean n'aient pu comprendre grand'chose à ce que Jésus leur dit en cette occasion, ses paroles bienveillantes se gravèrent dans leur coeur. Ils se les remémorèrent après la crucifixion et la résurrection, et elles leur apportèrent la joie d'un grand enrichissement dans leur ministère ultérieur. Il n'y a rien d'étonnant à ce que les apôtres n'aient pas pleinement compris les explications du Maître, car il projetait devant eux le plan d'un nouvel âge.
8. -- TRAVAIL À JÉRICHO
Durant leurs quatre semaines de séjour à Béthanie au delà du Jourdain, André envoya plusieurs fois par semaine deux apôtres ensemble à Jéricho pour un jour ou deux. Jean le Baptiste avait de nombreux fidèles à Jéricho, et la majorité d'entre eux accueillait volontiers les enseignements plus évolués de Jésus et de ses apôtres. Lors de ces visites à Jéricho, les apôtres commencèrent à exécuter plus strictement les instructions de Jésus concernant les soins aux malades; ils entrèrent dans chacune des maisons de la ville et cherchèrent à consoler tous les affligés.
Les apôtres exercèrent quelque peu leur apostolat en public à Jéricho, mais ils opérèrent surtout en privé d'une manière plus discrète. Ils firent alors la découverte que l'évangile du royaume apportait beaucoup de réconfort aux malade; et que leur message amenait la guérison des affligés. Ce fut à Jéricho que les douze mirent pleinement en pratique, pour la première fois, la recommandation de Jésus de prêcher la bonne nouvelle du royaume et de soigner les affligés.
Ils s'arrêtèrent à Jéricho sur le chemin allant à Jérusalem et y furent rattrapés par une délégation de Mésopotamiens qui étaient venus conférer avec Jésus. Les apôtres avaient projeté de passer seulement un jour à Jéricho, mais lorsque ces Orientaux à la recherche de la vérité arrivèrent, Jésus passa trois jours avec eux. Ils retournèrent à leurs diverses demeures de la vallée de l'Euphrate, heureux de connaître les nouvelles vérités du royaume des cieux.
9. -- DÉPART POUR JÉRUSALEM
Le dernier jour de mars, un lundi, Jésus et les douze entreprirent de passer par les montagnes pour se rendre à Jérusalem. Lazare de Béthanie était descendu deux fois au Jourdain pour voir Jésus, et toutes les dispositions avaient été prises pour que le Maître et ses apôtres installent leur quartier général à Béthanie chez Lazare et ses soeurs, aussi longtemps qu'ils désireraient séjourner à Jérusalem.
Les disciples de Jean restèrent à Béthanie au delà du Jourdain, enseignant et baptisant les foules, de sorte que Jésus était seulement accompagné par les douze lorsqu'il arriva chez Lazare. Jésus et les apôtres s'attardèrent là, durant cinq jours, à se reposer et à se délasser avant d'aller à Jérusalem pour la Pâque. Ce fut un grand événement dans la vie de Marthe et de Marie que de recevoir le Maître et ses apôtres dans la maison de leur frère, où elles étaient en mesure de pourvoir à leurs besoins.
Le dimanche matin 6 avril, Jésus et les apôtres se rendirent à Jérusalem. C'était la première fois que le Maître et les douze s'y trouvaient tous ensemble.



